« L’or bleu » en voie d’épuisement

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Le département des sciences de la nature et de la vie a organisé dans la matinée d’hier, au niveau de l’amphithéâtre de l’Université Mohand Akli Oulhadj de Bouira, un séminaire national autour des ressources en eau et la protection de l’environnement. Ainsi, plusieurs chercheurs et scientifiques, venus des quatre coins du pays, ont planché sur la question de la rationalisation de l’utilisation de l’or bleu, mais aussi comment sauvegarder notre environnement et éviter une apocalypse avant l’heure. En effet, au cours des dernières années, la communauté scientifique régionale a poursuivi sa structuration et consolidé sa cohésion au gré des nombreux projets de recherche (projets de l’Agence nationale de la recherche, internationaux, des 6e et 7e programmes cadres de l’Union européenne, investissements d’avenir…) et d’enseignement (mention de master « Eau », mastères…) qu’elle a portés et souvent réussis. Une sélection de ces projets réalisés par les unités de recherche est présentée dans ce document. A titre indicatif, dans son dernier rapport mondial sur les ressources en eau, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) employait déjà un ton pour le moins alarmant. « Il y était fait état, notamment, du fait qu’en dépit du caractère vital de l’eau, le secteur souffre d’un manque chronique d’intérêt politique, d’une mauvaise gouvernance et de sous investissement et qu’il est nécessaire d’agir d’urgence pour éviter une crise globale », a souligné le Dr Kateb de l’université d’Ouargla. Sur un autre plan plus global, d’autres intervenants, à l’instar de M. Rata, enseignant à l’Université  de Khemis Miliana, ont indiqué que les prélèvements annuels globaux par rapport au volume d’eau facilement accessible et « utilisable » sont évalués, aujourd’hui, à 3 800 milliards de m3, ce qui représente que 25% des ressources utilisables. Mais cette relative abondance ne reflète pas les énormes disparités de la distribution géographique de cette ressource vitale. Certaines régions sont, en effet, d’ores et déjà en état de stress hydrique (ressources inférieures à 500 m3 par an et par habitant) lorsque d’autres ont à faire face à des catastrophes liées à la surabondance chronique des précipitations. Ces inégalités entraînent des difficultés nombreuses et de tous ordres. Sur le plan démographique, par exemple, la croissance de la population mondiale augmente les besoins en eau de 64 milliards de m3 chaque année. Agriculture, développement économique et production d’énergie rendent indispensable une ressource toujours plus importante en fonction des choix stratégiques et des engagements qui en dépendent. Les désordres induits par le changement climatique ont aussi des conséquences sur le cycle hydrologique et, dans de nombreuses régions, les prévisions du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC) s’accordent sur des sécheresses plus longues et/ou des inondations plus fréquentes. Ces désordres viendront renforcer la dégradation, déjà constatée, des écosystèmes, par ailleurs, souvent surexploités en lien avec une pression anthropique sans cesse croissante. Mme Abdellaoui Sana, enseignante à l’université de Skikda, mettra également l’accent sur le plan sanitaire. Selon cette intervenante, on constate que dans les pays en développement, 80% des maladies sont liées à l’eau, conséquence d’un accès à une eau potable trop rare et à un criard manque d’infrastructures du fait d’un double déficit : financements et choix politico-stratégiques. Ce panorama de l’eau, somme toute inquiétant, doit aussi, désormais, prendre en compte l’appropriation croissante des questions environnementales par l’opinion publique ainsi que l’internationalisation et la globalisation de la réflexion autour de la question de l’eau. « L’or bleu » s’impose peu à peu comme un des enjeux les plus forts du XXIe siècle avec en arrière-plan la menace des « guerres de l’eau ». Dans un tel contexte, on conçoit aisément que, avant même toute réflexion quant à la gestion et à la gouvernance de la ressource, il soit nécessaire d’en assurer la maîtrise la plus complète possible. Il convient, pour cela, d’être en mesure de localiser, identifier, évaluer et mobiliser la ressource en eau. Ce sont des enjeux majeurs qui passent par l’analyse, la compréhension et la modélisation de l’ensemble des processus du cycle de l’eau qu’il soit naturel ou influencé par les activités humaines. La diversité des travaux menés par la communauté régionale au regard des eaux de surface en fait également une référence. Si la question fondamentale de la transformation de la pluie en débit, et donc en ressource disponible sous différentes formes (infiltrée, ruisselée, stockée), est au cœur des préoccupations des hydrologues, nombre d’autres questions sont également abordées. Parmi celles-ci, l’utilisation de l’eau en milieu agricole est essentielle, a fortiori dans le contexte méditerranéen. La question des crues, abordée notamment sous l’angle des évènements extrêmes (pluies et inondations dévastatrices), est incontournable et rassemble en région un grand nombre de compétences complémentaires. D’autres approches, enfin, se tournent vers le futur et ambitionnent, à l’aide des scénarios climatiques disponibles répondant à des hypothèses environnementales, économiques et démographiques variables, d’évaluer les ressources en eau. Les travaux de ce séminaire se poursuivent aujourd’hui et devraient aboutir sur une plateforme de recommandations.  

Ramdane B.

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