Se réveiller chaque matin à la même heure et se tourner les pouces est le lot quotidien de ces jeunes chômeurs au point où ils en sont.
Certains crient fort que seules des politiques d’emploi des jeunes conséquentes, spécifiques et réalistes, pourraient les aider à s’en sortir. Toutefois, des jeunes veulent à tout prix rompre avec la monotonie et refusent de se plier au marasme. A l’instar du jeune Hicham, âgé de vingt-cinq ans, à la corpulence forte et au sourire ravageur, qui vit avec ses parents. Il fait partie de ces jeunes gens au physique avenant qui n’ont pas eu la chance de faire éclore leur potentiel, faute de moyens. Il a très tôt quitté les bancs de l’école pour essayer d’apporter un appui financier à son père. Chaque matin, il va à la décharge juxtaposant sa demeure pour trier dans les odeurs nauséabondes afin de récolter une grande quantité de plastique soit les bouteilles de jus ou d’huile ou des cageots usagés. Il y travaille depuis qu’il a quitté l’école, confie-t-il dans un souffle, qu’il «n’a pas le choix». Autrement «comment pourrais-je subvenir à mes besoins les plus élémentaires comme m’acheter des habits par exemple ?» Malgré cette souffrance ces jeunes, et ils sont légion, sont tout fier de ce qu’ils font. Pour eux, le travail est la dignité de l’homme pour assurer le couvert à leur famille et il faut pour cela faire des sacrifices. «Même dans la jungle amazonienne ou le désert du Kalahari les autochtones sont obligés d’aller chercher leur nourriture. Ce n’est pas le même travail qu’ici, mais ils doivent souvent marcher pendant des heures pour trouver des plantes, du miel, des animaux à chasser. C’est certainement plus fatigant que de prendre le métro ou la voiture. Chacun sa vie, mais le « travail » est nécessaire si tu veux bouffer !», lance un jeune qui parle avec beaucoup d’émotions sur les conditions qui le poussent à faire ce travail. Différentes sont les raisons qui l’ont poussé à chercher du plastique pour le vendre à l’image de ce petit Abd Arezak âgé de 13 ans qui dit : «Je veux acheter des friandises, des chips sans solliciter chaque fois mon père et pour me le permettre je prends la peine de récupérer le plastique et le cuivre». Un autre jeune, Aziz voit les choses autrement. Pour lui, l’homme c’est celui qui travaille et qui tente d’améliorer ses conditions de vie et éviter des moments difficiles à sa famille : «Personne ne nous oblige à travailler mais c’est notre situation familiale qui nous y oblige. Le fait de travailler très tôt dans ces conditions rudes nous forge et nous permet d’améliorer nos conditions de vie». Ces jeunes ne rechignent pas à la tâche, chaque matin ils se lèvent à 4 heures pour tenter d’être les premiers sur les monticules de déchets. ‘’Les premiers levés sont les premiers servis ‘’, nous dit-on avec sourire. ‘’ L’idéal c’est de se faire un pactole avoisinant une récolte de 40 Kg, mais pour cela les efforts sont colossaux.’’ A raison de la vente à hauteur de 20 dinars le kg de plastique, certains de ces jeunes nous affirment pouvoir se faire jusqu’à 10.000 dinars par mois. Une somme rondelette mais qui ne pourra servir en cas de maladies. traîner à longueur de journée dans ces odeurs pestilentielles n’est pas sans risques mais comme ils le disent eux-mêmes, ‘’mieux vaut risquer sa vie en apportant aide et soutien à sa famille plutôt que de dépérir dans l’oisiveté et s’adonner aux vices et au marasme au quotidien.‘’
B. Nourredine

