Il faut rappeler que la loi sur les hydrocarbures a été initiée dans le cadre des réformes structurelles de l’économie et surtout dans un contexte de confrontation politique d’une rare férocité. Ce rappel au moment où le texte est parvenu sur le bureau de l’Assemblée Nationale est utile pour deux raisons essentielles. La première est qu’au moment où il n’était encore qu’une esquisse, il a provoqué une levée de boucliers aux antipodes de considérations économiques ou techniques que tout le monde comprendrait, mais pour des visées politiques évidentes. Abdelaziz Bouteflika, alors président-candidat, selon la formule consacrée, ne pouvait aux yeux de ses détracteurs, qui se recrutaient dans la maison FLN plus qu’ailleurs, ne pouvait être derrière une quelconque initiative intéressante pour le pays et à ce titre, il fallait le descendre y compris sur des terrains qu’on ignore. La première caractéristique de cette mauvaise foi est l’usage immodéré du discours pompeux quand la compétition exigeait l’argument scientifique. Il sera ainsi question de « privatisation de Sonatrach », de « bradage des ressources souterraines » et de « néo colonialisme » alors que très peu de gens avaient connaissance du texte, de son contenu et de ses visées stratégiques. La deuxième raison qui est un prolongement paradoxal de la première est qu’à l’ouverture des débats hier, après l’intervention de M. Chakib Khellil et le rapport de la commission, on s’est retrouvé pratiquement et a contrario dans la même situation. Ceux qui étaient hier contre ce texte sans savoir pourquoi le soutiennent aujourd’hui dans d’insoutenables envolées dithyrambiques, toujours sans savoir pourquoi.A tel point qu’il faut peut-être saluer « la sincérité » de ce pauvre député du FLN qui n’y a pas été par trente-six chemins. »Je suis avec Bouteflika mais je n’ai rien compris. Je demande qu’on m’explique ! ». Dans cet univers délirant, il restera bien sûr les interventions des députés du PT qui en ont, eux, parlé en connaissance de cause, même s’il est difficile de concilier la soixantaine d’amendements proposés et le rejet pur et simple d’une loi qui serait un péril pour la souveraineté nationale.Entre les deux s’intercalent le propos net et sans surprise de Miloud Chorfi, chef du groupe parlementaire du RND et « le poème » inclassable et sans risque de Layachi Daadouâ, son homologue du FLN. Le ministre de l’Energie qui devait répondre hier tard dans la soirée allait décidément évoluer sur du velours surtout que ce matin, à l’heure du vote, il n’y a pas grand mystère sur le résultat.
Slimane Laouari