109 balles pour venir à bout de la lumière, en vain

Partager

Le 15 mars, vers 10h30, deux voitures entrent au château royal du côté d’El Biar. Elles transportent les éléments du commando Delta, ils étaient 8 avec les chauffeurs. Les inspecteurs des centres sociaux de l’éducation étaient en réunion, ils sont venus de tous les coins d’Algérie. Les assassins, au nombre de six, après avoir coupé les fils du standard, un gars parmi les assassins pénètre dans la salle de réunion presque souriant et s’adresse à l’assistance : « on ne vous fera aucun mal». Il leur demande de se lever, de se mettre contre le mur et d’avoir les mains en l’air. Puis, il tire de sa poche un bout de papier et leur dit : ceux qui entendront leurs noms, qu’ils sortent de la salle. Marcel Basset, directeur du Centre de formation de l’éducation de base à Tixeraine (CSE d’Algérie) ; Robert Eymard, ancien instituteur et chef du bureau d’études pédagogiques aux CSE ; Mouloud Feraoun, directeur adjoint et chef de service des CSE, ancien instituteur et écrivain ; Ali Hammoutène, inspecteur de l’éducation nationale, directeur adjoint aux CSE et ancien instituteur ; Max Marchand (1911-1962), inspecteur d’académie, chef de service aux CSE et ancien instituteur ; Salah Ould Aoudia, ancien instituteur et inspecteur des centres de la région Alger Est. Ils seront alignés, dans un angle droit, trois d’un côté et trois de l’autre, selon leur origine. Les Français séparés des Algériens. Sans doute, dans leur bêtise, les criminels voulaient diviser les inspecteurs dans la mort. Ils avaient pointé deux fusils mitrailleurs face aux murs. Soudain, on entend des rafales, un peu plus tard des coups isolés, les coups de grâce. Puis, le silence. Un enfant de 15 ans, ayant entendu les détonations, accourt. Il croise les voitures des assassins, précédé par un car de police. Il profite de la confusion et s’introduit dans l’enceinte où a eu lieu l’innommable et découvre le corps de son père gisant par terre, dans une mare de sang. Feraoun se savait condamné il avait auparavant reçu plusieurs lettres de menace. Les hommes du lieutenant Roger Degueldre auront commis ce jour leur ultime forfait, à une poignée de jours du cessez-le-feu décrété pour le 19 mars à l’issue des accords d’Evian. Le Dr Hamoutène, fils de Ali, dira, lors de la commémoration de ce funeste jour, hier, à la Maison de la cCulture de Tizi-Ouzou, qu’il « souhaiterait que ce jour soit déclaré journée nationale de l’enseignant ou de l’école ». Souhaitons pour nôtre part qu’il sera exaucé.

Sadek A. H.

Partager