La toile de fond

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M. Annan va plus loin en soulignant les trois points les plus importants, à ses yeux, de l’ordre du jour. Déjà que le sommet arabe en a rarement eu un de précis, alors que ce rendez-vous d’Alger aborde des questions aussi importantes et tabous que « la paix avec Israël » proposée par la Jordanie, on en arrive à croire que le sérieux mis dans sa préparation n’est pas vain.Même si le sommet arabe dans l’opinion populaire de ses pays fait toujours soulever les épaules de fatalité. Mais c’est précisément parce que la paix avec Israël ou encore « la distinction » entre le volet financier et politique du soutien arabe à la cause palestinienne — un autre point que M. Annan trouve important — ne sont pas d’essence populaire qu’ils sont importants. D’abord parce que pour une rare fois, les choses seront tellement précises qu’il va être difficile aux régimes arabes de s’en sortir avec de vagues recommandations où l’approximatif le disputera à la redondance. Il est significatif d’ailleurs que sur la question de la paix avec Israël, trois Etats aient déjà pris les devants. Le Caire en nommant un nouvel ambassadeur à Tel Aviv, Tunis en invitant Shimon Peres et Amman en formulant la proposition pour le sommet d’Alger. Ensuite parce qu’il n’est ni réaliste ni de bon ton de s’éloigner d’un certain nombre de feuilles de route qui déterminent pour une grosse part toutes les initiatives régionales. Dernier point à attirer l’attention du secrétaire général de l’ONU et qui est directement lié à l’institution qu’il dirige, la représentation africaine au sein du Conseil de sécurité. Même si la réforme de l’ONU, qui est encore au stade d’idée, n’a pas encore tranché sur la nouvelle reconfiguration — d’où la difficulté à en parler concrètement — l’ombre de la compétition entre Alger et le Caire planera sur Club des Pins. Même si Koffi Annan n’a évoqué que les prétentions de l’Afrique du Sud et du Nigeria, l’Egypte ne désespère pas d’un siège arabe qui renforcera sa candidature, alors que l’Algérie, si elle venait à postuler, peut aisément jouer sur les deux fronts.Il restera bien sûr des sujets brûlants de l’actualité arabe qui seront présents-absents tels le Liban, l’Irak ou le Darfour. Trop brûlants peut-être pour espérer un quelconque dénouement dans un sommet qui, quoiqu’on dise, n’a pas encore tout à fait dépassé ses pesanteurs traditionnelles. Même si le rendez-vous d’Alger n’est pas tout à fait comme les autres. Ne serait-ce que pour ce qu’il a charrié comme initiatives avant sa tenue, dont cette réforme de la Ligue arabe esquissée par l’Algérie est la toile de fond.

Slimane Laouari

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