Comment êtes-vous venu à l’écriture ?nn Je suis venu à l’écriture par la lecture et la correspondance littéraire. Durant mon cursus universitaire, j’étais abonné en même temps à une quinzaine de bibliothèques, je lisais énormément. Je connaissais toutes les librairies d’Alger, le livre m’est devenu indispensable. Ma rencontre avec certains écrivains (comme Améziane Aïtouche) a été déterminante. Depuis 1990, j’ai découvert une passion : la correspondance littéraire. La lettre constitue pour moi un espace d’écriture libre. La correspondance est un dialogue différé, un échange communicationnel caractérisé par l’absence de l’interlocuteur même si le destinataire est textuellement présent. J’ai échangé les idées avec beaucoup d’écrivains : Djamal Amrani, Michel Tournier, Jean-Pierre Andrevon, Paul Jolas, Jean Brugheat, Henri Leroux, Madeleine Cholin, Henri Heinemann, Michel Kahn, Stephane Daws, Patricia Coulange et Mary-Paule Giuily. Ils m’ont tous encouragé à écrire. J’étais correspondant de la revue française éditée par la maison Rhodanienne de Poésie. J’ai rédigé des textes littéraires dans diverses publications (Algérie Littérature/ Action, ABC Amazigh, Rencontres Artistiques et Littéraires.) Les Editions françaises Clapas ont publié de deux recueils de poèmes : “Le temps asséché” (en 1997) et “Le gouvernail tombe à la mer” (en 1999). Les Editions Minuscules viennent de publier mon livre intitulé : “Essai sur Térence” suivi de “Dernières épîtres”.
Vous écrivez principalement des poèmes (vers et prose). Quelle est votre conception de l’acte poétique ?nn Pour tout poète, écrire est un besoin. Le poète a pour mission de réveiller le poète endormi chez les autres. Il propose une nouvelle configuration des possibles. Avec la poésie moderne, le poète renonce aux contraintes formelles en réinventant les signes langagiers. “La création poétique est d’abord violence faite au langage” avouait Octavio Paz. Le poète traduit l’indicible et fait naître des certitudes indéfinissables. La poésie est une pensée aux interrogations fondamentales. Elle est une foi armée de réflexions. Une foi éveilleuse. Paul Eluard disait : “Le poète est plus celui qui inspire que celui qui est inspiré”. Le poète éveille les sens et ébranle les sentiments : “Le poète est celui qui a le pouvoir de déclencher le réveil de l’émotion poétique dans l’âme du lecteur” écrivait Gaston BachelardDans votre livre publié récemment, la première partie est un essai sur Térence, pourquoi ce choix ?nn Térence est d’origine berbère, d’expression latine et d’inspiration grecque. Il était un génie qui n’a eu d’égal ni chez les anciens, ni parmi les contemporains. Il a écrit avec beaucoup d’élégance, de délicatesse et de pureté. Il a introduit le goût d’une comédie grave et sérieuse avec une force de l’action et du dialogue. Ses pièces sont pleines d’esprit. Sa dramaturgie eut une influence sur des auteurs de tous les temps. Mohamed Dib l’appelait “notre compatriote des temps anciens”. Un compatriote qu’il faudrait découvrir. Même si ses œuvres ne sont pas rééditées en Algérie, elles sont disponibles dans certaines bibliothèques, comme celle de la commune de Béjaïa où on peut trouver aussi “L’âne d’or” d’Apulée de Madaure, et tant d’autres merveilles.
Quelle appréciation faites-vous de la littérature algérienne actuelle ?nn Je lis la majorité des nouvelles parutions dans les trois langues (français, tamazight et arabe). La nouvelle génération commence à trouver son empreinte. On assiste à l’émergence de nouvelles plumes dans différents genres.De cette littérature en pleine émancipation, il y a une qualité indéniable. Les autorités doivent aider le secteur de l’édition et trouver un moyen de pousser les jeunes à la lecture.Le nombre de lecteurs algériens est négligeable. Notre école ne remplit plus sa mission. Afin d’éliminer l’illétrisme, il faut un changement radical de l’approche pédagogique de l’apprentissage de la lecture. Un apprentissage dans lequel doivent s’investir considérablement les parents.La façon de lire des enfants sont aussi l’affaire des parents. La lecture doit être vue comme un outil indispensable à bien manier car elle ouvre les portes du savoir. La lecture doit faire partie de nos habitudes quotidiennes.Qu’est-ce que vous lisez actuellement ?Comme je suis lecteur de la faculté des sciences de l’éducation de l’université du Qébec McGill, on m’a chargé d’évaluer des ouvrages qui figureront dans le répertoire d’œuvres littéraires pour la jeunesse. Je relis et étudie “La Racine carrée de Klonk” de François Gravel.
Des inédits, vous en avez certainement. Pouvez-vous nous en parler ?nn Dans quelques mois paraîtra mon livre intitulé “Auteurs choisis” aux Editions parisiennes Société des écrivains. Il s’agit de présentations d’auteurs algériens et français, de critiques de leurs œuvres et d’entretiens.
Un dernier mot ?nn A l’occasion de la nouvelle année 2006, je présente mes vœux de bonheur à tous. Je souhaite qu’il y aurait moins de conflits à travers le monde. Que l’esprit humanitaire renaisse partout !
Propos recueillis parBoualem Bouahmed