Le directeur du projet en parle

Partager

Confiés au groupement Algéro-Turc (ETRHB Haddad et Özgün), et lancés dernièrement, les travaux d’aménagement de la route des gorges de Kherrata n’ont pas encore atteint leur vitesse de croisière.

Après l’étude d’exécution, et pour l’obtention d’une route respectant les normes internationales surtout concernant la sécurité des usagers, et sauvegardant le caractère historique et touristique de cette région, des changements ont été opérés par le maître de l’œuvre, en collaboration avec le maître de l’ouvrage. Concernant le coût des travaux, des revalorisations ont été déjà négociées et d’autres pourraient être envisagées. D’après le directeur du projet et directeur du groupement, M. Cenk Ilker, l’emplacement du site pèse lourdement sur le coût des travaux. «La sécurisation du chantier coûte très cher», estime-t-il. À rappeler que cette route, creusée dans la montagne par les autorités coloniales, est enfouie entre deux massifs montagneux qui dépassent généralement 200 mètres de hauteur et surplombant un profond ravin, où coule tout au long de l’année l’oued Agrioune. La sécurisation des parois posera problème durant la réalisation, car les probables chûtes de pierres et éboulements influeront à coup sûr pendant les travaux, c’est ce qui va pousser l’entreprise à réaliser des prouesses technologiques. «Aux endroits les plus dangereux, nous creuserons des tunnels ou nous réaliserons des estacades (des portions de route en porte-à-faux) de 5 mètres. Une technologie qui sera utilisée pour la première fois en Algérie et rarement dans le monde», nous confie notre interlocuteur. Mais ces estacades résisteront-elles au poids lourd ? «Ne craignez rien, les calculs sont faits pour que ces portions de routes résistent même au poids des gros véhicules militaires !», nous répond M. Cenk en souriant. Concernant le lot 3 (lot tunnel) d’une longueur de 260 ml, pour un montant d’un milliard (01) de dinars et une durée de réalisation de 12 mois, il était prévu que l’entreprise Özgün procéderait à la réfection des anciens tunnels et au creusement d’un nouveau tunnel d’une longueur de 70 mètres, mais dans le souci de ne pas altérer le caractère historique et artistique des gorges de Kherrata, l’État a décidé de ne pas toucher aux ouvrages existants. Ainsi, quatre tunnels seront creusés jouxtant les six anciens tunnels. Özgün est chargée, pour le moment, d’en réaliser seulement deux. «Pour les deux autres, un nouvel appel d’offres sera lancé incessamment par l’État algérien», précise M. Cenk. L’autre modification est sans doute le pont «Hinouz», un endroit rempli d’histoire pour l’Algérie, car, c’est de là que furent précipités des centaines d’Algériens durant les événements du 08 mai 1945, quand la ville est touchée par les Massacres de Sétif et Guelma et pendant lesquels des émeutes nationalistes algériennes sont réprimées dans le sang par les forces armées françaises. «Au début, l’État algérien nous avait recommandé de seulement renforcer ce pont, mais comme cela fut impossible, nous avons décidé d’un commun accord, d’édifier un autre pont jouxtant l’ancien», déclare encore M. Cenk. La stèle actuelle érigée en la mémoire de ces événements sera déplacée et édifiée de l’autre côté de l’ancien pont. Sous les deux ponts, des espaces pour la promenade seront aménagés de part et d’autre de l’oued Agrioune et un pont suspendu sera réalisé pour relier les deux rives. Pour rejoindre ces espaces à partir de la route, de larges escaliers sont prévus, mais pour le moment, cela n’est qu’une proposition qui attend l’approbation de plusieurs ministères. Concernant la main-d’œuvre, M. Cenk déclare qu’il préfère travailler avec les éléments locaux. Pour l’instant, l’entreprise a déjà recruté 185 ouvriers (150 Algériens et 35 Turcs), et ils seront renforcés par 100 Algériens et 30 Turcs dans les mois à venir. Cela exclu le lot 1 (lot route) confié à l’entreprise ETRHB Haddad, qui n’a pas encore entamé les travaux. Pour l’instant, l’entreprise ne fait face à aucune difficulté ni avec l’entourage ni avec l’administration. Pour être à la hauteur de la confiance placée en elle par les autorités locales et nationales, à leur tête le DTP de Béjaïa et les deux walis (l’ancien et le nouveau), Özgün veut, non seulement, offrir des postes de travail aux Algériens, mais aussi faire du bon travail et former les ingénieurs locaux pour en faire des spécialistes des tunnels et d’ouvrages d’art. «J’aimerai seulement que les ouvriers nous aident en respectant du mieux qu’ils le peuvent les contrats qu’ils ont signés avec nous», dira-t-il.

Pour ce qui est du délai de réalisation qui est de 28 mois, le directeur du projet compte le respecter et pourquoi pas tenter de terminer avant échéance, sauf si des difficultés liées aux travaux ne viennent prolonger cette durée. Pour cela, il souhaite que les opérations en suspens, à savoir l’appel d’offre pour les deux tunnels, ainsi que l’aménagement du pont Hinouz soient vite réglés. En tout cas, pour se permettre une route aux normes européennes, l’Algérie doit mettre le paquet et faire le nécessaire pour éviter de répéter les erreurs commises dans l’édification de l’autoroute Est-ouest. Certainement, qu’avec les années de disette qui s’annoncent pour notre pays, réaliser de tels projets ne sera plus possible dans un avenir proche ! Ainsi, il serait judicieux de saisir l’occasion pour mener à bien ce projet, en aménageant des espaces de loisirs le long de cette route pour donner plus de beauté et de prestige à cet endroit et pouvoir attirer des touristes locaux et étrangers, car, les gorges de Kherrata, comme les gorges du Verdon en France, sont déjà un site touristique connu et reconnu à travers le monde.

Saïd M.

Partager