Le musée régional du Moudjahid a rendu hommage, hier, à un autre moudjahid parmi la longue liste des noms des martyres de la wilaya III pendant l’ère coloniale. Un hommage à Zidane Saïd, dit Saïd Ouzidane, qui a d’ailleurs permis de lever le voile sur la fameuse opération «bleuit» qui n’est qu’ «un coup monté» selon les moudjahidines ayant apporté leurs témoignages à l’occasion. Parmi les journées commémoratives initiées pour rendre hommage aux chouhada dont est habitué le musée régional du Moudjahid de Tizi-Ouzou, celui d’hier s’est voulu «une restitution» de la vérité et de la réalité des faits, comme semblait s’entendre à dire les intervenants à l’occasion de l’hommage. Ceci, étant donné que lors de l’hommage on a inévitablement évoqué l’opération «bleuite». Une opération d’infiltration de l’armée française pendant les années chaudes de la guerre de libération, suite à laquelle le colon a semé le doute parmi les rangs des moudjahidine, expliquait hier les intervenants, tout en rappelant que parmi les résultats de cette opération, «l’exécution dans l’erreur de nombreux éléments des rangs des maquisards ayant été pris pour des traitres». Et Zidane Saïd dit Saïd Ouzidane en faisait partie. Pour Si Ouali Aït Ahmed, ancien officier de l’ALN, l’opération «bleuite» était une lourde erreur. Il se rappelle, d’ailleurs, les dires du Colonel Amirouche Aït Hamouda qui, lors d’une réunion avec plus de 700 officiers, le 12 octobre 1958, «nous a interdit de nommer les victimes de l’opération autrement que Moudjahidine». Pour lui, suite à cette attaque muette de la part de l’armée française, «entre 350 et 400 martyrs ont perdu la vie, accusés de traîtrise», dont Zidane Saïd. Pour ce dernier, l’intervenant se rappelle l’avoir connu lors de ses déplacements qui l’on mené au village Aït Frah, dans la région de Larbaâ Nath Irathen. Il avoue, d’ailleurs, avoir «constaté sur place l’organisation de cet homme et son implication. «Il s’occupait de la logistique mais veiller à la vigilance et je voyais ça», soulignera-t-il. Ajoutant que «Saïd Ouzidane était un grand et a connu les grands dont Si Nacer, Si Taher et Krim Belkacem». Pour lui, «la bleuite» n’est autre qu’une riposte de l’armée coloniale contre l’opération «oiseaux bleus». Un témoignage soutenu par Hocine Mohand qui ajoute que «s’il y avait des traitres, ils nous auraient tous anéantis», rappelant dans le sillage que «Saïd Ouzidane a fait de sa maison un abri où il accueillait les frères d’armes, tout en impliquant toute sa famille». Omar Atlaoui abonde aussi dans le même sens, en affirmant que pour lui «la bleuite n’existe pas», en nous invitant à entendre la version et les dires des vrais moudjahidines pour connaître la vérité. «Tous ceux qui ont été accusés de traitrise suite aux doute semé par l’armée française, on les connaissait tous. On a fait le même parcours avec plusieurs d’entre eux, c’est impensable», dira-t-il. De son côté intervenant à l’occasion de l’ouverture de la journée commémorative, le directeur du musée régional du Moudjahid, Chabane Hamcha, rappelle une fois de plus la nécessité de rendre l’hommage qu’il faut à ceux qui n’ont pas hésité de donner leur vie pour l’indépendance du pays. Pour lui, les documents sont là et les témoignages aussi, pour parler des accomplissements de chacun. Saïd Ouzidane, de son vrai nom Zidane Saïd, est né le 15 septembre 1911 au village Aït Frah, dans la commune et daïra de Larbaâ Nath Irathen, et issu d’une famille modeste et révolutionnaire. Ses premiers pas dans le militantisme commencent avec son adhésion au PPA et au MTLD quelque temps après son retour de France. Cette adhésion mise à nu par la police française, il est emprisonné une année à Aïn Timouchent avant d’être soumis à la résidence surveillée. Mais dès le déclanchement de la guerre de libération, il rejoint le maquis et transforme sa maison en refuge secret et lieu de réunion des Moudjahidine. Plusieurs fois ciblée par les gendarmes coloniaux, sa maison fut détruite en 1957, il sera ainsi obligé d’organiser les rencontres dans la maison de son beau frère, puisque à compter de 1956, il fut désigné par Si Tarek comme chef du front au village. Il a participé à plusieurs batailles à Aït Frah, parmi elles : «L’attaque d’Ifrassen» le 15 avril 1956, la bataille de «Thamazirth taklith» en 1957. Il a, par la suite, été désigné commissaire politique dans la même région. Ce n’est qu’avec le complot psychologique que l’armée française qui le traquait a eu raison de lui, et il disparaîtra en 1958. «La bleuit en l’occurrence a semé le doute dans les rangs de l’ALN et beaucoup de fidèles Moudjahidine ont payé de leur vie, pendant la révolution, malgré leur innocence», note-t-on.
Tassadit Ch.