Opération ville morte hier à Tizi-Ouzou. Une vraie démonstration de force des commerçants de la ville dans le conflit les opposant à leur bureau de wilaya de l’UGCAA auquel ils dénient toute représentativité.
Ils ont répondu massivement à l’appel à la grève générale, lancé par leurs délégués il y a une semaine. Un rassemblement a par ailleurs été bservé, sur la place de l’ancienne mairie du chef lieu. Il faut signaler que la grève a été suivie à travers quasiment toutes les daïras et communes de la wilaya. Partout le constat était le même : le mot d’ordre a été suivi. Une seule revendication était pour rappel avancée par les contestataires : «le gel des activités de l’actuel bureau de l’UGCAA, non représentatif, et l’organisation d’élections démocratiques et libres auxquelles pouront participer même les membres du bureau actuel décriés». Doit-on que le bureau actuel n’a pas tenu d’assemblée depuis plusieurs années et l’actuel responsable a été désigné par la direction nationale de l’UGCAA et non élu par la base. «Notre grève d’aujourd’hui est une réussite à travers tout le territoire de la wilaya. C’est notre troisième action réussie, après la grève du 13 décembre et l’assemblée générale que nous avions organisée à la Maison de la culture, lors de laquelle on a sauvé la wilaya, et le pays, du plan orchestré par les rédacteurs de l’appel anonyme à la grève. Aujourd’hui, les commerçants de la wilaya de Tizi-Ouzou ont prouvé que le bureau UGCAA locale n’est pas représentatif. Tous les commerces ont fermé, ce qui prouve que ce n’est pas un conflit qui oppose juste les grossistes et l’UGCAA. Comme veut le réduire l’actuel bureau pour tromper. C’est un problème entre tous les commerçants et leur bureau. Ils veulent des comptes et une élection pour désigner ses représentants», nous a déclaré Samir Djebar, délégué des commerçants et président de l’Union des grossistes de Tizi-Ouzou. «100 000 commerçants ont fermé aujourd’hui. Tous mobilisés, tous solidaires avec nous contre ce bureau qui n’est pas représentatif», insistera-t-il. Les commerçants étaient également plusieurs centaines sur la place de la mairie. Ils n’ont pas cessé d’applaudir leurs représentants qui se sont succédé pour des prises de parole. Tous ont salué «la mobilisation et la solidarité des commerçants». «On ne voulait pas en arriver à cette grève, mais on ne nous a pas laissé le choix», diront-ils. «M. Abba, 75 ans, 27 ans à la tête de l’UGCAA, sans se soucier un jour des problèmes des commerçants. Barakat !», criera un intervenant. Les commerçants ont par ailleurs précisé que la grève a été leur dernier recours : «Nous avons vraiment été patients, nous avons entrepris plusieurs démarches avant d’en arriver à cette action. Nous avons eu une réunion avec le chef de cabinet et les représentants de l’UGCAA centrale et on n’a eu aucun écho positif (…)». Au cours du rassemblement, quelques problèmes rencontrés par les commerçants ont été évoqués. Il a été décidé de suivre les dossiers des quelques commerçants qui sont toujours en situation de conflit avec la CASNOS.
“On ne peut pas chambouler le règlement intérieur, il faut respecter la loi”
Par ailleurs, du côté de l’UGCAA, la situation ne semble pas trop les inquiéter. Le secrétaire national chargé du règlement des conflits, M. Aoudia Ahmed Zinedine, qui était hier à Tizi-Ouzou, probablement, pour suivre la situation, a expliqué : «On a eu notre congrès national en janvier 2015. Avant cette date, on travaillait avec des assemblées, les bureaux communaux, les représentants des daïras, on faisait des réunions pour élire le bureau de wilaya. Après le cinquième congrès, la loi organique et le règlement intérieur de l’UGCAA ont changé. On est passé à la désignation. C’est le secrétaire général, Salah Souilah, qui désigne le coordinateur de wilaya. Ce dernier propose des noms pour constituer le bureau de wilaya, noms qu’il transmet au bureau national qui décide». Il ajoutera : «Maintenant, si les commerçants ont des problèmes, on est à leur disposition. On est le syndicat des commerçants, on fera le nécessaire pour les aider». Le chargé de règlement des conflits à l’UGCAA poursuivra : «Mais s’ils nous demandent de chambouler le règlement interne de l’UGCAA, nous n’acceptons pas». Il expliquera : «Il y a une loi qu’on doit respecter, plus de 800 congressistes l’ont approuvée. Les grossistes, on connait leurs problèmes. Ils veulent un lot du terrain pour construire un marché de gros, mais cela n’est pas du ressort de l’UGCAA, même si nous aurions pu saisir les autorités pour les aider (…) Mais faire une grève, ça nous ne l’acceptons pas (…) Leurs revendications ne sont pas légitimes (…) La grève de Tizi-Ouzou est illégale». Rien que ça ! Dit dans un langage plus simple M. Souilah s’est taillé un nouveau règlement sur taille qui lui permet de désigner, d’imposer, des tuteurs en guises de représentants à la base. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n y a point de logique dans cette hiérarchie, plus grave encore s’agissant dans le cas présent d’un syndicat. Et ca se passe en 2017 s’il vous plait. Quelle belle avancée démocratique consentie par l’UGCAA ! En somme, c’est sans doute pour cette raison que le SG de l’UGCAA tente d’ignorer cette révolte des commerçants de Tizi-Ouzou car à bien y voir c’est carrément le fonctionnement rétrograde de l’UGCCA qui est remis en cause à travers la contestation d’un représentant imposé d’en haut. Qui de surcroit cumule 75 ans d’âge et plus de 20 ans à la tête de cette structure comme l’a souligné un intervenant lors du rassemblement du centre ville.
Les “explications” du coordinateur de wilaya décrié
M. Abba Hamid, l’actuel coordinateur de la wilaya pour sa part, a estimé qu’il n’y avait pas de problème de représentativité au sein du l’UGCAA de wilaya, mais qu’il y a surtout «un problème organique qui ne concerne pas les commerçants». «S’il y a un problème, c’est aux membres de l’UGCAA de le régler, pas à la rue». «Aujourd’hui des gens qui appartiennent à un certain milieu et qui sont payés ont appelé à la fermeture», a-t-il accusé. «Ces grossistes ont l’avantage d’être à Anar Amellal, il y a une forte concentration là-bas, c’est ce qui fait qu’ils ont de l’influence, ils ont un peu plus de pouvoir que nous sur ce plan», reconnaitra M. Abba, expliquant la réussite de la grève : «C’est ce qui a fait que la grève soit suivie à 90% à Tizi-Ouzou. Ailleurs, ce ne fut pas partout le cas». «Ces gens ont mis le paquet et ont mobilisé des moyens que nous n’avons pas (…) Je ne compte pas m’éterniser, je ne tiens pas à rester, mais…».
Nouvelle grève projetée pour la semaine prochaine si…
Il est à noter enfin que les commerçants, à l’issue de leur rassemblement, ont décidé à l’unanimité de recourir à une autre grève générale, les dimanche et lundi prochains, dans le cas où leur action d’hier n’aboutissait pas à la satisfaction de leurs revendications.
Kamela Haddoum