Tayeb Mokadem, l’inamovible coordinateur de wilaya du RND à Tizi-Ouzou, n’est désormais plus en place. Il a été relevé officiellement, mercredi dernier, par le secrétaire général Ahmed Ouyahia.
La décision porte le N°2017/42 et est datée du 6 juin, même si le document n’a fuité qu’avant-hier en soirée. En effet, au moment où les cadres du parti étaient en regroupement à Alger en prévision du Conseil national, à Tizi-Ouzou, les membres du Conseil de wilaya touchés n’avaient pas encore la nouvelle de la surprenante décision du patron qui a consenti, enfin, à signer la fin de mission à celui qui était présenté, du moins jusque-là comme son protégé. Le patron du RND a été visiblement contraint de céder, cette fois, après l’avoir, maintes fois, soutenu face à la fronde d’une partie de la base qui a, plus d’une fois, montré son hostilité à l’égard de ce quadruple député, accusé d’avoir, à plusieurs reprises, piétiné le règlement intérieur du parti. Le dernier épisode en date remonte à samedi dernier, lorsque le désormais ex-coodinateur de wilaya prétendait, selon une source avisée, lors d’une réunion du bureau de wilaya avoir «reçu le feu vert du patron de dissoudre le Conseil de wilaya». La déclaration a sonné comme un avertissement du concerné qu’il compte bien passer à la purge, pour nettoyer la structure de toute voix discordante à sa vision, notamment les contestataires de la dernière liste établie pour les dernières législatives, alors que la dissolution d’un tel organe du parti ne peut aucunement être envisagée dans les prérogatives d’un coordinateur de wilaya. Ouyahia a-t-il été informé de cet énième écart ? Possible. Mais pour ceux qui connaissent le secrétaire général du RND, «même s’il a été avisé, Ouyahia n’est pas du genre à trancher sur un coup de tête. La décision remonterait, sans doute, à bien avant les élections, pour ne pas dire à la veille. Ce n’est tout de même pas rien ce qui s’est passé. Ce fut un vrai scandale autour de la confection de la liste. Le concerné, alors premier responsable du parti localement, a remis en cause la liste établie par une commission collégiale qu’il a lui-même installée. Le premier désaveu pour lui est là. Et ce n’est pas le genre de détails qui échappe à Ouyahia quand bien même il a fermé les yeux pour ne pas étaler plus que cela le scandale. Et puis, Ouyahia est assez rompu en politique pour savoir qu’il n’est jamais indiqué de trancher des décisions à l’allure de sanction à la veille d’une élection. ça engendre toujours une déstabilisation et partant une démobilisation au sein des militants», commente une voix très au fait des développements dans la maison RND.
Les vraies raisons de la fin de mission
Pour certains membres du bureau de wilaya, on n’exclut pas qu’Ouyahia ait consenti à donner suite, même tardivement, à leur requête datée du 28 février dernier, portant carrément retrait de confiance à Tayeb Mokadem comme coordinateur de wilaya, au lendemain, justement, du «cirque de l’établissement de la fameuse liste des législatives», ironise cette autre indiscrétion. À travers le document, signé par pas moins de quatorze membres de l’instance, dont, au moins, cinq membres du Conseil national et l’actuelle seconde députée de wilaya du parti, le désormais ex-coodinateur de wilaya est lourdement chargé de plusieurs dépassements dans la gestion du bureau de wilaya, particulièrement cette histoire de commission de candidature installée, puis dénigrée et décréditée par le concerné lui-même, à savoir M. Mokadem. Ce dernier s’était, pourtant, «engagé et a même prêté serment sur le Coran qu’il allait respecter les conclusions de la commission devant tout le monde», note la requête transmise au secrétaire général du RND. Les auteurs du retrait de confiance ne s’arrêtent pas là et rajoutent une autre couche en accusant leur ex-coordinateur de wilaya, obnubilé à leurs yeux par sa propre personne, d’«orchestrer tout un Conseil de wilaya élargi qui le remontera de la cinquième place à la tête de la liste», le tout pour s’assurer… un quatrième mandat de député. «Difficile de parler dans ces conditions de démocratie ou d’alternance. Mais on a fait confiance à notre secrétaire général et il a bien veillé, comme il l’a toujours fait, à porter toujours haut le RND, loin des petites et personnelles considérations», commentait, hier, un cadre du parti de la wilaya. Dans le camp des adversaires de Mokadem, on «espère que c’est une nouvelle page qui s’ouvre pour le parti à Tizi-Ouzou. On a perdu un précieux temps, ce changement aurait du être entériné lors de l’épisode tumultueux de l’hôtel Lala Khedidja du temps de Bensalah, mais bon… l’essentiel est que la sérénité revienne et tout le monde se mobilise pour réussir de meilleures locales (élections locales à venir)». Pour rappel, à cette ère (celle de Bensalah), le conflit s’est exacerbé entre les cadres du parti et Mokadem et ses fidèles. Les frondeurs étaient arrivés jusqu’à mettre en place carrément un Conseil de wilaya parallèle, sous la supervision d’une commission nationale, à sa tête Dr Faden, dépêchée à partir d’Alger. Mais les résolutions tranchées ce jour là dans une ambiance qui a frisé l’affrontement entre pro et contre, ne seront entérinées qu’en partie, puisqu’aucune désignation d’un nouveau coordinateur de wilaya, tant attendue, ne suivra. Pis, pour les initiateurs du tumultueux conclave, ce sera Mokadem qui finira par être reconduit et réhabilité par Ouyahia qui allait reprendre les rênes du parti quelques mois après… Près de deux anq plus tard, il finira donc par le dégommer lui-même avec ce quatrième mandat parlementaire en dernier cadeau ? Ou pour un avenir meilleur ? Qui sait ? Car la politique ressemble un peu au foot. Cela dit, en attendant de voir encore plus clair dans cette affaire de limogeage, le bruit de la succession a quasiment déjà intronisé le député sortant du parti, Azwaw Belgacem.
Amya C.