“La Kabylie belle et rebelle” la nouvelle œuvre de Yazid Bekka et de Yalla Seddiki

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Le photographe Yazid Bekka et l’écrivain-directeur Yalla Seddiki ont fait paraître ces derniers jours, une nouvelle œuvre consacrée à la Kabylie et à laquelle ils ont attribué le titre de Kabylie belle et rebelle.

L’œuvre éditée par les éditions “Non lieu” de Michel Carosso est sous forme d’un album-photo, portant des images récentes, prises au mois de mai dernier à travers différentes régions de la Kabylie, mais aussi des images datant d’une vingtaine d’années. Les photos sont illustrées par des poèmes de Kabylie.

En somme, c’est un voyage et la découverte de toute une région recèlant un patrimoine culturel important que cette œuvre offre un lecteur, particulièrement pour celui qui méconnaît la Kabylie.

Yazid Bekka est éditeur dans le groupe du Nouvel observateur pour le magazine Challenges et photographe-reporter. Il a effectué des reportages en France, en Algérie, en Afrique noire et à Haïti. Ce photographe kabyle qui vit outre-mer a eu à participer à de nombreuses expositions en France, en particulier dans diverses FNAC. Yalla Seddiki lui est un jeune écrivain et chercheur.

Il a publié des poèmes dans plusieurs revues. Il a traduit et commenté le recueil de poésies chantées de Matoub Lounès, sous le titre Mon nom est combat, paru à Paris la Découverte en 2003. Il est aussi coordinateur d’un numéro de la revue Europe qui sera consacré à la Kabylie et qui très probablement, paraîtra au premier trimestre de 2007. Yazid Bekka déclare dans la préface de cette œuvre : “Ce travail de mémoire s’est alors imposé à moi. A travers plus de vingt ans d’image, de souvenir”.

Le photographe raconte son coup de cœur avec le monde de la photographie, qui remonte à 1987, âgé alors de 27 ans. “J’étais jeune, plein d’entrain, et des projets plein la tête. Photographie notamment. Depuis que, dans ma tendre enfance, j’avais découvert, au fond de la cave de mes parents, leurs vieux 6×6, je prenais plaisir à mettre dans ma boite les gens, rien que les gens. Pour motiver mes clichés, au-delà de ceux que je réalisais à Paris pour une agence de presse, je venais avec un plaisir immense retrouver les anciens à Taddart…” racontait le photographe. Pour lui “la photographie est cette tentative naïve pour retarder le temps, pour arrêter la mort, sur un instant, un regard, une situation qui continuent à vivre dans le souvenir”. Dans cette longue préface, le photographe tente d’expliquer les motifs qui l’on encourage à prendre cette initiative qui consiste à immortaliser et à illustrer la Kabylie dans un livre-album, relustré encore par des poèmes, écrits ou chantés par les enfants de cette région, aux caractéristiques particulier.

Si auparavant Yazid Bekka à travers son appareil tente d’immortaliser dans des images, les gens de sa famille, ses aïeux notamment qui disparaissaient l’un après l’autre, il a constaté qu’en parallèle, c’est toute la région, qui recèle une culture millénaire menacée de disparition.

Avec les années, le travail a pris une autre tournure, ce n’était plus seulement les gens qui disparaissaient, mais une société, une architecture, une culture, à travers un quart de siècle de voyages et de séjours en Kabylie “j’ai vu la société amazighe se muer, les gens se transformer, j’ai pris peur, je l’avoue”.

Et de décrire encore la Kabylie : “Morceau égaré de l’Algérie. Morceau que l’on a envie de croquer à belles dents, Tamurt n’yoqbayliyen, qui fut hier terre rebelle, est aujourd’hui pays de tourmente, mais toujours rebelle. Depuis la nuit des temps, ce pays des tribus amazighs, cette terre d’insoumis, s’est battue pour la reconnaissance de sa culture et de sa langue. Romains, Barbares, Arabe, Turcs, Français… aucun de ces envahisseur n’est parvenu à mâter ce fier peuple berbère”.

Cette émotion appelée poésie

Les dizaines de photos prises à travers les quatre coins de la kabylie sont accompagnées par la poésie qui constitue l’âme et l’arme des habitants de cette région d’Algérie. Le jeune universitaire Yalla Seddiki à qui revenait cette tâche, a tenté de présenter des poèmes appartenant à des poètes de la région. Parmi eux ceux qui ont eu une renommée et d’autres en connus du public.

Il a reproduit des poètes qui nous ont quittés et d’autres qui sont parmi nous. L’on peut retrouver dans cette œuvre des poèmes d’Aït Menguellet, Jean Amrouche, Slimane Azem, Cherifa, Tahar Djaout, El Hasnaoui, Ferhat, Cherif Kheddam, Matoub Lounès, Amar Mezdad, Takfarinas, Zedek Mouloud, Salem Zenia etc.

En plus de cette reproduction, Yalla Seddiki a assuré une traduction très réfléchie, en kabyle des poèmes écrits en français. Et en français des poèmes écrit en kabyle. Après une préface en tamazight, Yalla Seddiki décrit aussi dans le post-face la poésie chez les Kabyles : “Aussi loin que remonte la mémoire de ceux que l’on appelle les Kabyles, la parole transmise jusque dans le secret et la terreur demeure la sentinelle qui ravive la conscience”.

Et de continuer : “L’être et l’émotion, l’identité et le chant sont si indissociablement liés qu’il n’est pas possible à l’observateur de prétendre comprendre la Kabylie s’il ne s’avise pas de cette émotion appelée poésie”. Pour l’auteur : “La poésie est la lézarde à travers laquelle l’air parcourt, à l’essouffler, l’ordre forgé par des croyances autochtones parfois rigide jusqu’à la tyrannie et surtout par celui imposé, sous des livres différents, par des millénaires de domination étrangère. Celles des Phéniciens, des Romains, des Turcs, des Français, etc”.

Ont contribué aussi à la réalisation de cette œuvre beaucoup d’autres personnes, entre autres Emmanuelle Favien, Zoulikha Guellil, Hélène Arnault, Laurent Verdier, Veronique Belluz.

A la fin de ce recueil, une bibliographie a été consacrée à plusieurs poètes Kabyles. Enfin à signaler que le livre sera édité en Algérie par la même maison d’édition.

Kabylie, belle et rebelle, est une œuvre magnifique à comtempler et à lire. Elle est un témoignage et un voyage à travers la Kabylie, ce morceau de l’Algérie et de tamazigh qui reste lié jalousement à ses fondements et à ses traditions.

Mourad Hammami

Notes : Kabylie, belle et rebelle

Edition Non lieu 2006

3, Rue de Suez 75018 Paris.

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