La Kabylie visitée de ses lointaines origines

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Son site se situe entre l’embouchure de Oued Tafna, la frontière marocaine et l’embouchure de Oued Em-Mersa, occupant une ancienne colonie romaine, au pied du mont Touent, dont l’extrémité supérieure est un vaste plateau investi par une tribu berbère, dénommée par les Arabes “Dj’maâ Ghzaouet”, dont le hameau fournissait de redoutables écumeurs des mers, depuis les Berbères jusqu’à l’époque turque. C’est là aussi que fut massacré le colonel Montagnac et sa colonne militaire, au début de la colonisation française. Ce qui valut à Ghazaouet un rempart de haute sécurité, préservant une logistique militaire importante en matériel lourd. A l’Est du littoral tlemcenien, s’étend la région de Aïn-Témouchent qui couvre un territoire très fertile, dont l’implantation du chef-lieu reprend les assises d’une ville antique, qui portait à l’époque romaine le nom sympathique de “Abala”. A en juger les dimensions qui constituent l’étendue de ses ruines, le nombre d’Inscriptions qu’on y a découvert, les sculptures, les débris de colonnes, les chapiteaux, les statues, etc, elle devait avoir une grande influence sur son époque. Aïn-Témouchent était au début de la colonisation française, une petite ville très animée et prospère, au cœur d’un territoire développant de grandes capacités agraires, cultivant un vignoble d’une qualité nettement supérieure, très appréciée. Sa population était alors de sept mille habitants et partageait une intégrité sans faille avec l’Oranie, dont le chef-lieu.

Oran El Bahia

Oran, eut des débuts très difficiles au commencement de son histoire. Fondée par les Arabes en 902, elle est presque entièrement détruite sept ans plus tard. Aussitôt relevée de ses ruines, elle replonge dans les affres de l’invasion dans la violence et le sang. Dépeuplée en 955, elle devint une ville frôlant l’abandon, jusqu’en l’an 1000. Elle changeait constamment d’occupants, et subit tour à tour la domination des Oméyades, des Almoravides, des Almouahades, des Mirinides…, jusqu’à devenir, pour une courte période en 1437, la vassale du royaume de Tunis. Pendant près de trois siècles, de 1509 à 1792, Oran vit sous la bannière espagnole, qui lui donne l’aspect d’une grandeur particulière. Cependant, auparavant en l’an 1790, un séisme d’une magnitude très forte ébranla la ville, détruisant une grande partie de ses fortifications et casernements, provoquant un énorme affaiblissement dans son potentiel de défense et dérouta son armée, qui subit la capitulation devant les Turcs, cédant place libre au Bey de Mascara. Depuis, dominée par ces derniers qui ont de tout temps instauré un régime totalitaire et sans scrupule, là où ils se sont produits, Oran devint le théâtre d’intrigues incessantes et de crimes en série, qui amenèrent tout un défilé de beys, dont l’un, Hussein, qui comptait parmi les trente-trois qui se sont succédés en moins d’un demi-siècle aux destinées de cette ville, livra bataille à ceux qui répudiaient leur présence, parmi lesquels le meneur était le propre père de l’Emir Abdelkader. Puis vint le tour de la colonisation française, qui s’en empara le 4 janvier 1831. Elle n’eut qu’à réparer les forts et casernes espagnols, dressés sur les crêtes et les promontoires pour rendre la place inexpugnable. Les forteresses tombées en ruines, sont tout ce qui reste des gros travaux abandonnés par les anciens maîtres des lieux. Les habitations espagnoles forment un lot de constructions groupées en amphithéâtre, faisant voir des maisons blanches étagées, dont le fait d’être aperçues de loin valut à la ville d’Oran, le surnom de “Blanca”. A cette époque, une enceinte de sécurité, percée de six portes, cernait la ville contenait trois groupes ethniques de race différentes : le premier qui était “européen”, s’est approprié le quartier de la marine, le second qui était “maure” s’est installé sur le versant est de la ville, le troisième qui était “espagnol” s’est implanté dans la partie ouest, qu’on appelait “Blanca”. Pendant la période espagnole, plusieurs garnisons confortaient la ville, donnant l’impression d’être une chaîne de fortifications imprenables, à l’exemple de la forteresse “Santa Cruz” qui veille en guetteur au sommet du Pic Aïdour, juchée à trois cents mètres d’altitude, non loin de l’endroit où se trouve la kouba de Sidi Abderrahmane El Djillali, élevée au sein d’un petit plateau du mont le Murdjadjo. De cet endroit s’offre une vue qui présente du côté de la mer le port Mers El Kébir, plus loin, la superbe station balnéaire de Aïn El Turck, au-delà de laquelle se profile au loin le phare du Cap Falcon. Si on tourne le regard vers le Sud, on découvre d’un œil admirateur la plaine verdoyante qui s’étend au pied du massif de Thassalah, dont le point le plus élevé culmine à 1 059 mètres d’altitude, à l’ouest les monts de Tlemcen présentent le détail de leur versant est, peut-être pour mieux séduire l’œil contemplatif qui se poserait sur eux ? Puis, la montagne des “Lions” qui dresse comme un dôme, une masse compacte qui domine toute la chaîne du littoral méditerranéen, dont le djebel Ourousse, par son allongement, assure une protection naturelle au port Mers El Kébir, dont la première pierre fut posée par les Romains et portait alors le nom antique de “Portus Divinus”. C’est là que les Espagnols et les Portugais vinrent accoster, quand ils décidèrent de châtier les Forbans qui écumaient la Méditerranée, malmenant et dépouillant la marine marchande. C’est là aussi que prit pied le général Damremont, lorsqu’il entreprit la conquête de l’Oranie. Cependant, Mers El Kébir est un port qui a de tout temps suscité la convoitise, subissant sans cesse les vicissitudes des puissances étrangères, au même titre que son grand voisin le port d’Oran et tombèrent en même temps au pouvoir des Turcs, et la France coloniale en dernier lieu. L’agglomération portuaire de Mers El Kébir était accrochée en ce temps-là, à une sorte d’arête rocheuse, dominée par une forteresse espagnole vieille et flétrie, élevée sur la partie supérieure d’une langue de terre qui va pénétrant dans la mer. La colonisation française valut néanmoins au port d’Oran une extension de vingt-quatre hectares, alors qu’il était une simple Darce, malgré ses occupants successifs et son activité intense depuis l’époque romaine et portait le nom de “Portus Magnus”. Son nouvel aspect fait baisser considérablement la contribution apportée par son vieux rival Mers-El-Kébir, qui avait le rôle de régulateur principal des échanges commerciaux entre l’Ouest algérien et l’étranger. Le littoral oranais partage sa frontière avec la ville côtière de Mostaganem, située à quatre-vingt neuf kilomètres de là. Dépendant de la Mauritanie césarienne, la traçabilité de son appartenance à cette époque, est plutôt rare. Néanmoins, selon la chronique musulmane, la fondation de la ville arabe remonterait au XIIe siècle. Au XVe siècle, les Maures qui étaient chassés d’Espagne vinrent s’y installer. Peu après, les Espagnols prirent possession des lieux qui furent reconquis par les Frères Barberousse. Cependant, la prospérité de cette cité qui avait atteint l’apogée d’une grandeur certaine, par rapport à la richesse de ses terres, fut au milieu du XVIe siècle. Auparavant, près de trois siècles durant, les guerres incessantes et les incursions effrénées des Arabes puis le règne “infidèle” des Turcs, taxèrent sévèrement le grand mouvement agricole imprimé par les Maures à leur quotidien. En 1833, l’armée coloniale française l’envahit à son tour, s’emparant à la force du matériel et du nombre, des différentes places fortes de la ville, que sont : la Citadelle turque qui était réputée inexpugnable, le Fort des Cigognes qu’on disait inaccessible à plus d’un titre, le Fort dit Bab El Djerrad protégé à l’époque par des remparts impressionnants se sont avérés aussi frêles que s’ils étaient fait en carton-pâte. Néanmoins, pendant des mois, des affrontements successifs éclataient entre les réguliers de l’Emir Abdelkader et les troupes coloniales françaises, provoquant des dégâts importants, humains et matériels, sans pour autant libérer une parcelle de Mostaganem, qui est construite en platitude sur les hauteurs d’une falaise de cent mètres environ, scindée en deux par le ravin de Aïn-Es’sahra. Elle possède sur son sol plusieurs Medersa où les tolbas, issus de divers endroits de la région, viennent y puiser la science du Coran. Jouissant d’un climat exceptionnel, elle est d’un environnement très fertile, qui fournit de très bonnes cultures. Le produit de ses pêches est très apprécié,. Les régions qui l’entourent ont les faveurs du même privilège climatique et agricole, dont l’immensité des plaines forme une étendue uniforme, d’une verdure extraordinaire pendant la saison des pluies, roussâtre durant l’été. Elle est traversée par oued Cheliff, qui prend sa source au pied du djebel Amour, dans la région de Laghouat, pour jeter enfin ses eaux bourbeuses près de Mostaganem, après un parcours de sept-cent kilomètres. Cependant, c’est un oued qui est peu profond pour permettre la navigation, et n’est pas poissonneux. Seuls quelques radeaux amarrés à un cordage solidement ancrés aux deux rives, font traverser le bétail et autres denrées. C’est un affluent qui a les berges soumises à des vents très froids en hiver, et à un sirocco excessivement chaud en été.

Chlef la rebelle

La ville de Chlef qui occupe les hauteurs, remplit un plateau aride qui côtoie la partie orientale du oued en question, et dominée du côté sud par des monts élevés et une forêt de pins d’Alep et de caroubiers qui continue son prolongement vers le sud-ouest, où le paysage cheliffien affirme une nature accueillante, donnant l’impression d’une oasis de paix, au calme bienfaiteur. Une muraille de sécurité, percée de huit portes, enveloppait autrefois la ville, fondée en 1843 par la colonie française à l’endroit qui était un emplacement de ruines et de broussailles. Lors du creusement des fouilles, il fut découvert les vestiges de la basilique romaine de “Saint-Reparatus”, dont la mosaïque était remarquablement conservée, et à laquelle s’ajoutaient ceux de l’antique “Castellum Tingitii”. Son littoral comporte un port de pêche, sis à Ténès, qui est une ville côtière de proportion moyenne, nichée au creux du massif montagneux du “Dahra”, qui fixe la région de démarcation entre le territoire de Tipaza, et celui de Mostaganem. Ténès est une ville constituée de deux quartiers distinctement différents l’un de l’autre : Le premier, s’il faut croire la légende, était un repère de Forbans, dont les demeures surmontent le promontoire qui les soutient, par des paliers d’une surface inégale, en remplacement des habitations coloniales phéniciennes, le second regroupe l’ensemble construit en 1843 par le génie militaire colonial, selon les besoins du moment, sollicités par les colons en matière de modernité urbaine et de confort. Ses assises reprennent celles de la ville romaine “Cartenna”, qui était construite à cette époque en forme d’escaliers, pour une hauteur de cinquante mètres environ qui offre un contrôle rigoureux sur la mer. Vers l’est, une vue superbe coiffe la ville de oued Alallah faite de jardins rieurs et de vastes plaines magnifiquement couchées d’une verdure miroitante sous l’effet du vent qui produit sur elle des vagues incessantes. Un amphithéâtre de montagnes élevées, se dresse à l’horizon, concluant d’une main d’artiste les contours de l’énorme masse grise du Cap-Ténès, dont la partie occidentale se termine par un escarpement qui finit presque à pic dans la mer. Non loin de là, se situe le quartier de la marine, qui comptait autrefois de nombreux vestiges de l’époque romaine et byzantine, telles que : des mosaïques, des colonnes, des médailles frappées pour la plupart à l’effigie de Constantin 1er, découvertes avec d’autres objets, lors de la pose des premières fouilles de la ville coloniale. Le Dahra est un massif montagneux qui s’étend de la vallée du Cheliff jusqu’à la Méditerranée, soit une distance de deux cents kilomètres, développent un volume compact de cent-trente mille hectares. Sa population qui est de race berbère, est très belliqueuse. La conquête de leur territoire par la colonisation, ne s’est pas faite sans avoir payé au préalable un lourd tribut. C’est une région faite également de hauts plateaux disposés en gradins, naturellement parallèles à la côte. Cependant, Ténès est une ville côtière presque isolée, déviée de sa destinée par rapport à ce qu’elle devait être. Elle est issue d’un territoire proche du Zaccar, dont la division en deux parties forme une chaîne de montagnes intérieures, appelées le Zaccar occidental et développe une altitude de 1519 mètres, le Zaccar oriental, celle de 1535 mètres. Le Zaccar occidental offre une vue magnifique sur la ville de Miliana et ses environs. Ses assises occupent celles de l’antique “Malliana” des Romains qui fut très prospère à cette époque. Elle disparut, au Ve siècle, suite à un enchaînement de guerres sans répit, qui désolèrent une grande partie des villes importantes du Maghreb. Elle réapparut néanmoins au Xe siècle, ressuscitée par le fils d’un patriarche berbère, nommé “Ziri”. Cependant, éprouvée une fois encore par des affrontements incessants, elle devient rapidement une ville qui a perdu beaucoup de son ampleur, malgré la présence d’une haute muraille de protection qui reprend le pourtour exact de l’ancienne implantation romaine. Les troupes coloniales françaises s’en emparèrent en 1840. Elle eut à soutenir par la suite, sous ses nouveaux occupants, les assauts répétés de l’Emir Abdelkader, et ses réguliers n’éprouvent de repos que lorsque celui-ci recula vers l’Oranie. Le massif du Zaccar comprend également dans son voisinage la ville de Hammam-Righa, qui est une station thermale de renom, célèbre par ses sources, découvertes à l’époque romaine et portait le nom de “Aquœ Calédœ”. Elle était une colonie de vétérans et un point de relais important. Son existence qui figurait dans l’itinéraire.

D’Antonin, était mentionnée en 44 avant J.C. Cependant, elle fut rasée complètement par les Vandales au 6e siècle, au même titre que la plupart des villes qui faisaient la grandeur de Rome en Afrique septentrionale. Ce n’est qu’en 1842, lorsqu’il fallait tracer la route reliant la ville de Blida à celle de Miliana, que le génie militaire de l’époque découvrit fortuitement le site qui couvrait cette antique ville thermale, ramenant à jour les vestiges de nombreuses piscines, au milieu desquelles jaillissaient des sources d’eau chaude, variant entre 45° et 72° C. L’ensemble découvert comprend les bassins dallés ou revêtus de granit ; des pierres souterraines, maçonnées de briques pleines, portant pour certaines la trace du feu qui servait à produire l’évaporation de l’eau contenue dans les étuves ou élever la température des surfaces de bain des “Sudatoria”. Sont également sorties des fouilles, des stèles, des pierres et des colonnades, portant des inscriptions gravées, répandues un peu partout et confirmant nettement la renommés des “thermes” de cette station à l’époque romaine. La partie ouest de son plateau, comporte les résidences de luxe que sont les “Hospitia”, dans lesquels les malades sont admis selon leur fortune ou le standing du rang qu’ils occupent. Là aussi est élevé un temple dédié à Apollon Hygin.

Cherchell, splendeur antique

Au nord du Zaccar, se trouve la ville de Cherchell, située sur les rives de la Méditerranée, et dotée d’un port de moyen commerce, protégé par une crique naturelle, dénommée à l’époque coloniale “Ilot Joinville”. A l’origine, Cherchell était l’Iol des Phéniciens, la Caesarae des Romains et couvrait une superficie de quatre cents hectares. Elle était la capitale de la Mauritanie césarienne et sa construction choisie lui valut l’appellation de “Splendissima Colonia Caes arienis”. Cette splendeur antique est confirmée par les nombreuses ruines de gros œuvres qui jonchent son sol, tels que : les Citernes, près de la porte de Miliana, le théâtre, qui a perdu ses gradins au profit de l’édification de la ville coloniale ; le cirque où furent supliciés Saint-Séverin, Saint-Marcian et Sainte-Aquila ; un Aqueduc, ayant servi à ramener l’eau dans la ville ; un forum où les rencontres animaient les nouvelles de Rome et ses provinces, un amphithéâtre, des thermes, un temple élevé à Neptune, les Bains de Diane, etc.

De nombreuses statues en marbre, étaient découvertes chaque jour au début de la colonisation française. En avant du port, figuraient des édifices en ruines, dont les pierres gigantesques ciselées, auraient servi à d’autres constructions. Cependant, la ville romaine et son port étaient déjà saccagés par les Vandales au VIe siècle, réprimant tout ce qui est Romain. Les Arabes qui vinrent après, en firent autant. A la fin du XVe siècle, quelques centaines de familles maures, chassées d’Andalousie, vinrent s’y établir, ramenant avec eux divers métiers artisanaux, tels que la fabrication des ustensiles de cuisines en terre cuite ; la forge et la ferronnerie, la cordonnerie, la fabrication des instruments de musique de type oriental, la fabrication des objets en acier, etc. Le port expédiait des quantités importantes de figues sèches, qui étaient le principal produit d’exportation de la région, offrant à la communauté cherchelloise l’opportunité de négocier des échanges commerciaux avec l’étranger, au même titre que les céréales ou le vin pour d’autres régions. Selon certains faits rapportés par l’histoire, il en sortait également des Corsaires. Cependant, l’événement historique qui a marqué les annales de la ville, est le soulèvement des habitants de Gouraya, issus de la tribu berbère des Béni-Ménacer, en juillet, 1871. Ce jour-là, décidés de répondre par la colère aux manquements et autres vexations tenus à leur endroit par l’envahisseur, ils bloquèrent toutes les voies menant à Cherchell et attaquèrent en renfort le cantonnement européen, provoquant le déclic d’un affrontement sanglant qui dura plus d’un mois, et valut aux deux antagonistes des pertes considérables. C’est seulement à la mort de l’instigateur, Malek El Berkani, que s’arrêta l’insurrection qui aurait pu atteindre des proportions plus graves, et aurait poussé d’autres régions à la rébellion, du fait qu’elle coïncidait avec celle menée à l’est du pays par le bach agha El Mokrani. De toutes les dominations qui se sont succédées à Cherchell, l’époque romaine est la seule qui y apporta une prospérité économique importante, assurant à son port une activité qui profitait à tous. Elle comptait alors près de cent-cinquante mille habitants et côtoyait un magnifique paysage qui comprend le mont Gouraya, dont l’altitude de 1500 mètres offre une vue panoramique spectaculaire. Son site est distant de trente kilomètres à l’est de Cherchell. La tribu berbère qui l’habite, était très redoutée des premiers colons qui se sont fixés dans cette région, qui compte également dans son environnement le pittoresque Djebel Chenoua qui est une grosse masse rocheuse de 1000 mètres d’altitude dont le versant Nord plonge à pic dans la mer. Il est peuplé par la tribu berbère des Béni-Chenoua, bien que cette langue n’est pas vraiment usitée dans la région, comme en Kabylie. C’est une tribu qui était aussi méfiante et rebelle que sa voisine de Gouraya. Les Turcs qui les ont approchés par la pratique de la religion musulmane, ne réussiront jamais à s’attacher leurs services, ni à tromper leur vigilance. Vingt et un kilomètres plus loin, à l’extrémité nord-ouest de la plaine de la Mitidja, protégée des vents du Nord par le Djebel Chenoua, la ville de Tipaza dresse une silhouette encore fièrement gardienne du lien historique qui faisait sa grandeur dans l’antiquité romaine et celle aujourd’hui d’une ville balnéaire de renom. Elle est située au pied des coteaux du Sahel, côtoyant un environnement de collines verdoyantes, et des falaises aux contours capricieux. Son sol compte un nombre important de vestiges dont quelques-uns attestent qu’elle était à l’époque phénicienne, un comptoir de commerce ou un “Emporium”, établis par les Carthaginois. Après l’annexion de la Mauritanie césarienne, Claude fit de cette ville une colonie qui accéda au droit latin et favorisa son extension jusqu’aux limites des collines de l’Est et de l’Ouest. Il fit construire un mur de protection de deux mille deux cent mètres de long, procurant ainsi la sécurité à une population de cent-vingt mille habitants. C’est une période qui permit à Tipaza de devenir une ville, ayant le port au service de toute la partie occidentale de la Mitidja, assurant la liaison d’un commerce continu avec la Gaule, l’Italie et Marseille. Les communications avec l’intérieur étaient maintenues, grâce à un réseau de bonnes routes. Cependant, la dominaion des Vandales tomba sur eux comme un couperet, brisant tout élan du progrès entamé. Ses habitants, pour fuir la persécution, se réfugièrent en Espagne pour la plupart, provoquant un exode qui déstabilisera toute la région. C’est en 1854 que la colonisation française, récupérant les fouilles de la ville romaine, engagea des moyens adéquats au développement et à la relance de celle-ci. Le port prit une nouvelle ampleur au profit d’une activité portuaire intensifiée. L’extension de la culture de la vigne a donné des crus de bonne qualité. C’est aussi une ville qui dénombre sur son sol des ruines considérables : un amphithéâtre, des thermes, un château d’eau, un cirque, une église byzantine élevée dans la partie ouest de la ville, la basilique de Sainte-Salza qui couronnait le sommet de la colline de l’Est, des pierres votives, etc. Cependant, hélas, la population coloniale de la région s’est servie de celles-ci comme d’une carrière pour la construction de leurs maisons. Un grand nombre des habitations coloniales, comptent dans leurs murs ou leurs jardins, des objets archéologiques de valeur, notamment des éléments d’architecture, des inscriptions gravées sur pierres de taille, des jarres antiques ayant contenu le vin ou l’huile, etc… A quelques lieues de là, on trouve un mausolée en ruine, dénommé le “Tombeau de la Chrétienne”, c’est un monument élevé au sommet d’une colline de 260 mètres de hauteur, constituant une masse de maçonnerie quadrangulaire, se terminant en une pyramide formée par des degrés superposés dont la pierre est dans un état d’éffritement avancé. Sa hauteur d’origine devrait être de trente ou quarante mètres. L’histoire rapporte qu’il fut selon Pomponius Mela, le sépulcre d’une famille royale de la Numidie. D’autres disent qu’il est le “tombeau royal” de Juba II, qui était le vassal de Rome, enclin à la beauté au raffinement et l’amour des belles choses. Le littoral de Tipaza se situe aux limites frontalières d’Alger, occupant l’emplacement d’un site, qui était dans l’antiquité celui de la ville romaine “Ecosium” détruite au Ve siècle par les Vandales. C’est seulement au Xe siècle que le patriarche berbère Ziri, autorise son fils à fonder trois villes, qui se prénommeront : Médéa, Miliana, Djazaïr Beni-Mezghana, qui est cette dernière.

Beni-Mezghana, Alger la blanche

Au XVe siècle, les Espagnols. fatigués des incursions de plus en plus intenses des corsaires qui se réfugiaient dans cette ville, firent construire une grande tour sur une des petites îles alors en avant d’Alger, dominant le port turc qui était une darse de trois hectares et l’armèrent d’une grosse artillerie pouvant surveiller celle-ci. Le nom qui lui a été donné alors, était “Pinon de Argel”, le Rocher d’Alger.

Surpris par cette stratégie inattendue, offerte par le relief irrégulier de la côte algéroise, les frères Barberousse créent l’Odjeac, et s’y établissent définitivement. Ce qui freina pour un temps, le ballet naval ininterrompu entre corsaires du roi et forbans. En 1516 Arroudj repoussa la flotte de Francesco de Vera, qu’il dispersa. Keir Eddine faillit décimer en 1518, celle imposante de Hugo de Moncade et s’empara du Rocher d’Alger,en 1530 l’imposante armada de Charles-Quint. Depuis, les pirates devenus les maîtres du jeu transforment Alger en leur principal repaire et plaque tournante de leur puissance. De 1515 à 1830, près de soixante-dix pachas ou deys se succèdent à Alger et finissent pour la plupart assassinés.Mais, l’Odjeac se maintient et Alger reste fièrement la blanche capitale d’un pays qui, grandissant toujours forme ce que l’Europe appelait “La Régence d’Alger”. A diverses reprises, les Occidentaux essaient de réduire ces derniers, en vain. Alger cinq fois bombardée, par Duquesne en 1682 et 1683 par d’Estrées en 1688, par les Espagnols en 1783 et par l’Anglais Exmouth en 1816 renaissait chaque fois de ses cendres, et demeurait “une menace permanente pour l’Europe” trouvait-on à dire pour légitimer l’acte commis par la France, usant de subterfuges pour envahir le territoire algérien et s’y installer pour une période de colonisation qui dura cent trente-deux ans. Les monuments liés au périple historique d’Alger, qui préservent encore une architecture supposée authentique, sont peu nombreux on compte parmi eux : la grande Mosquée, dont la construction remonte au XVe siècle, dotée d’un intérieur richement conçu, paré de colonnades finement ciselées qui soutiennent un toit aux angles arrondis sur des arcades dentelées. Elle est surmontée d’un minaret datant du XIVe siècle. Le mausolée de Sidi Abderrahmane Thaâlabi, que l’on cite comme un théologien éminent et un marabout vénéré, est édifié au XVe siècle. Il comporte outre la sépulture de celui-ci, celles de personnages importants qui ont assumé des rôles déterminants dans l’histoire de notre pays, avant la conquête coloniale française, notamment Ahmed, le dernier bey de Constantine. A l’entour figure la Médersa et Thaâlibia, dont le concept du bâti intègre un style d’architecture de type hispano-mauresque, très en vogue en Afrique du Nord au XIIIe et XIVe siècle. Néanmoins, l’objet principale qui est la raison d’être de cet établissement, est l’enseignement supérieur de la théologie musulmane aux adeptes du Coran. Dans le contexte des monuments algérois figurent également la mosquée de la Pêcherie, qui borde la partie nord de la ville, dont la construction relativement simple, date de 1960, surmontée d’une grande coupole ovoïde et d’un minaret carré d’une grande hauteur, le Palais de Mustapha Pacha qu’il fit construire en 1779, dans le pur style de l’architecture algéroise, cédé aux activités de la Bibliothèque nationale, Fort l’Empereur, dont les ruines occupent les hauteur d’Alger, ayant la présence qui rappelle irrémédiablement l’explosion fortuite de 1830, qui détermina la reddition d’Alger. L’environnement algérois est bordé d’un côté par la Méditerranée et les montagnes, et de l’autre par la Mitidja dont l’immensité de la plaine couvre une superficie de deux-cents mille hectares et fut un lieu d’abondance des Romains.

Rachid Medjeber

A suivre

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