“Nous avons un grand contentieux international”

Partager

Après un break de deux jours, le tribunal criminel près la cour de Blida, a repris les auditions des témoins et autres accusés dans le cadre du traitement de l’affaire de la caisse principale, ouverte depuis le 8 janvier dernier. Appelé à la barre, Chachoua Abdelhafih, directeur général prévention et sécurité nie avoir ramener de l’argent pour Khalifa. La présidente du tribunal interpelle Akli Youcef lequel avaitdéjà affirmé au juge d’instruction que Chachoua est venu lui-même prendre de l’argent. Celui-ci, debout du box des accusés, maintient ses propos. De son côté, Abdelwahab Delal soutient qu’il se rendait souvent à la caisse principale : «Chachoua qui recevait des instructions de Moumen me demandait d’aller chercher de l’argent qu’il remettait ensuite à Khalifa. Je renretrouvais Chachoua à la sixième marche dans le siège Khalifa afin de lui remettre le sac», affirme-t-il. La juge veut savoir pourquoi il ne terminait pas sa mission. Delal répond qu’il n’avait pas accès au bureau de Khalifa Moumen. Voulant le piège, Mme Fatiha Brahimi avance que Chachoua pouvait prendre l’argent. «C’était mon travail», se justifie-t-il. Alors, la magistrate interroge Réda Abdelwahab, chargé de la sécurité personnelle de Khalifa. «Est-ce que vous avez remarqué que Moumen Khalifa ramenait des sacs d’argent», lui demande-t-elle. Réda répond n’avoir jamais remarqué cela. «J’étais chargé de lui ramener parfois de l’argent dans des enveloppes mais jamais dans des sacs.», s’est-il contenté de dire. La présidente de l’audience reprend la parole pour demander à Chachoua si c’était lui qui avait contacté les autres pour trouver des solutions aux 11 EES représentant le le déficit de la caisse principale de la banque El Khalifa. Le directeur général de Khalifa prévention et sécurité récuse ces propos.

Chachoua dans de mauvais draps :

Moment de confrontation. La présidente fait appel, tour à tour à la barre à, Akli Youcef, Hammou Nekkache, ainsiq qu’à Mouloud Toudjane respectivement caissier principal et directeurs généraux adjoints chargés de la comptabilité. Ces derniers enfoncent Chachoua en soulignant que celui-ci les a contactés pour leurs demander de se rendre au siège de Khalifa Bank. Mme Brahimi, interpelle, cette fois-ci, Mir Ahmed, inspecteur général adjoint et lui fait rappeler qu’il avait déjà affirmé au juge d’instruction qu’il n’avait pas le droit d’inspecter la comptabilité. «Moumen nous interdit formellement d’accéder au services stratégiques», confinera-t-il. Ces propos suscitent la réaction spontanée de la présidente de la cour. «Il vous interdit de faire ça mais vous tolère de faire des voyages et de lui ramener de l’argent», constate Mme Brahimi. Cette dernière reprend la parole pour faire appel à Hamid Foufa, désigné, le 06 décembre 2003, par la magistrat instructeur prés la cour de Cheraga pour faire une expertise comptable et estimer le préjudice causé à la caisse principale de la banque El Khalifa. «On a fait n’importe quoi», estime Hamid Foufa au sujet de l’établissement des 11 EES (écritures entre sièges) destinés au préalable à «camoufler» le trou financier en question. La magistrate veut savoir si les 11 avis bancaires comportaient des anomalies. L’expert répond que l’ordre a été donné pour régler la caisse principale sans nullement réfléchir aux conséquences.

Le représentant du ministère public prend la parole pour rappeler à l’endroit de Foufa qu’il a déjà affirmé au juge d’instruction que les responsables de la banque ne disposaient pas de l’expérience professionnelle nécessaire et avaient des niveaux d’instructions limités. Le procureur veut plus d’explications. «Il y à absence de comptabilité», répond-t-il laconiquement avant de soutenir que le documents concernant les 11 EES n’est pas fiable. Le magistrat veut savoir comment peut-on qualifier de faux ESS. Gêné, Foufa observe un moment d’hésitation avant de lâcher «c’est de la fraude».Ce dernier atteste que si la comptabilité avait l’habitude de travailler quotidiennement, ils peuvent aller plus loin que les 11 EES.A la question de savoir s’il est logique de donner de l’argent à Khalifa Moumen, lequel avait pour habitude de puiser dans la caisse principale, Foufa justifie cette pratique par le «manque de courage et d’expérience» de ceux chargés de faire la comptabilité de la caisse principale. Sur l’interférence entre les prérogatives des responsables d’El Khalifa Bank, cet expert s’interroge pour sa part pourquoi avoir deux directeurs généraux adjoints à la comptabilité au lieu d’un seul. Il qualifie de «stupide» le trou de la caisse principale. Sait-il si Khalifa avait un compte courant bancaire ? Le témoin dit n’avoir «jamais» vérifié cet aspect.

la justice française a été déloyale, selon Badsi

Au cours de l’après-midi, le tribunal fait appel à Moncef Badsi, liquidateur de la banque El Khalifa. Dans un long constat relatif à la liquidation de cette banque, Badsi rappelle qu’il fallait répondre dans l’urgence au «drame» de 200 000 déposants potentiels. Après un travail de six mois, le liquidateur enregistre le traitement d’environ 100 mille chèques et la distribution de 7 milliards de dinars. Il estime que notre pays est loin d’affronter le sinistre de la banqueroute d’El Khalifa. Badsi en veut pour preuve la liquidation en France de Khalifa Airways et Khalifa cars. «Nous avons un grand contentieux international au Liban, à Londres et en Arabie Saoudite», dira-t-il et d’ajouter que des patrimoines sont restés à l’étranger alors qu’ils devaient être rapatriés. Le liquidateur, également expert comptable depuis 1965, note que les procédures minimales dans l’octroi de crédits n’ont pas été respectées. Pour lui, il est clair que la loi interdit que les membres de la famille puissent bénéficier de crédits. Or de nombreux proches de l’ex-golden boy ont été gratifiés de crédits à profusion. «Nous sortons avec une facture très lourde», dit-il. Au chapitre des problèmes que rencontre Badsi, il cite celui des avions d’El Khalifa, du traitement des unités de dessalement de l’eau de mer et la villa sise à Cannes en France. Sur ce dernier point, le liquidateur déplore que tout ce qui se trouve en France a été liquidé au profit du liquidateur français y compris la villa cannoise. «La justice française a été déloyale. Il est impossible de spolier une société de droit algérien en ce qui concerne les liquidations», clame-t-il. Dans le cadre de son travail, M.Badsi observe que le problème du foncier est très complexe puisque les biens ont été acquis dans des conditions contestables.

Hocine Lamriben

Partager