Live Earth, l’initiative de l’ex-vice-président américain Al Gore, a fait boule de neige. Que ce soit Madonna, Metallica ou Garou, des dizaines de grands noms de la musique se sont produits à Johannesburg, Sydney, Rio de Janeiro ou Montréal. L’objectif: sensibiliser les Terriens aux changements climatiques. Jusqu’à deux milliards de personnes pourraient avoir regardé ces concerts. Nos journalistes étaient à Londres, au New Jersey et, bien sûr, à Montréal. Voici leurs comptes rendus.
Montréal a finalement eu son Live Earth. Ou plutôt son Montréal sur Terre. Après un sprint d’organisation de dernière minute, le spectacle satellite de la dizaine de grands concerts internationaux a eu lieu au Vieux-Port, hier soir.
Le quai Jacques-Cartier pouvait accueillir 20 000 personnes. Environ 12 000 sont venues, selon les organisateurs. Pour un concert annoncé officiellement il y a à peine plus d’une semaine, il était fort content.
Le concert a débuté vers 20h45, avec quelque 45 minutes de retard. Steven Guilbeault, de Greenpeace, a félicité la foule d’avoir dit « faut que ça change » en même temps que deux milliards de spectateurs et téléspectateurs dans le monde. Il a ensuite présenté Zachary Richard, qui a ouvert le bal avec son succès Jean Batailleur. Le résidant de La Nouvelle Orléans a profité de chaque pause entre les chansons pour rappeler la tragédie de l’ouragan Katrina.
« Je suis là pour témoigner, a lancé le chanteur, devant un quai à moitié plein et sous un ciel devenu rose. Une fois qu’on a brisé le climat, une fois qu’on a détruit l’environnement, il n’y a plus de retour. »
Richard a enchaîné avec The Leave Broke et Promesse cassée. Alors qu’il avait quitté la scène, il a été invité par Steven Guilbeault à y revenir pour entonner L’arbre est dans ses feuilles, une prestation qui n’était pas prévue au programme.
Est venue ensuite Marilou, à qui Mélanie Renaud a succédé, puis Daniel Boucher, Pascale Picard, Éric Lapointe, et ainsi de suite, jusqu’à DJ Champion, aux platines pour le reste de la soirée.
Les amis de Live Earth
L’idée du concert planétaire Live Earth a été lancée en février dernier par le producteur américain Kevin Wall, celui-là même qui avait lancé la campagne mondiale contre la pauvreté Live 8 en 2005. Il s’est allié à l’ex-vice-président américain Al Gore, auteur du livre et documentaire Une vérité qui dérange, pour mener l’entreprise à bon port.
En tout, quelque 150 artistes devaient se produire sur neuf scènes un peu partout sur la planète, hier: à Sydney, Tokyo, Kyoto et Shanghai, à Londres et à Hambourg, à Johannesburg, au New Jersey, à Washington et à Rio de Janeiro, où la justice a finalement donné le feu vert vendredi à l’organisation du concert.
Une poignée d’autres villes ont pu, comme Montréal, bénéficier du statut de « Friends of Live Earth ».
C’est l’acquisition de ce statut qui a causé les délais dans l’organisation du concert à Montréal par la Fondation Sedna, mise sur pied par le cinéaste et explorateur Jean Lemire. Steven Guilbeault et Pierre Lussier, du Jour de la Terre, ont aussi mis la main à la pâte. Ils n’ont reçu qu’il y a quelques jours l’aval du groupe d’Al Gore et Kevin Wall. Les nombreuses contraintes environnementales y sont pour quelque chose.
« Tu ne peux pas être Friend of Live Earth si tu n’as pas ton accréditation”, explique Jean Lemire, président du conseil d’administration de la Fondation. Et ça a été assez long. Parce que, par exemple, tous les shows sur la planète doivent utiliser un type de lumière qui prend 50% moins d’énergie, tu dois être zéro déchet, zéro carbone… C’est beaucoup, beaucoup d’organisation. »
Partout sur le site, des employés du Consortium Écho-Logique s’affairaient à amasser, trier, recycler et composter les déchets. Les membres de l’organisation aussi ont fait leur part, de l’achat de crédits de carbone pour compenser les émissions durant la soirée aux gobelets biodégradables, vendus 1$.
« On n’a aucun événement à Montréal ou en région aussi propre qu’ici”, a lancé Carine Blenny, adjointe aux événements spéciaux pour Écho-Logique. Les gens arrivent déjà sensibilisés. Et aussi, ils vont recevoir toute la soirée des messages environnementaux… Je pense qu’on devrait finir la soirée en beauté! »
« C’est important pour les gens de sentir que ça vaut la peine”, estime pour sa part Jean Lemire. Qu’on n’est pas seul, qu’il y a un mouvement de société. Si on réussit vraiment à lancer ce mouvement de société, rien ne va l’arrêter. Les gouvernements n’auront pas le choix. »
« C’est pour ça que j’ai refusé toute présence politique”, a-t-il poursuivi. Ce n’est pas un show de revendication, vraiment. C’est un show où on dit: c’est un défi de société. On va vous montrer qu’on n’est pas tout seuls. »
Ce refus n’a pas empêché quelques politiciens, dont Pauline Marois, de se glisser dans la foule, plus ou moins incognito. Il n’a pas non plus empêché Steven Guilbeault d’interpeller Stephen Harper du haut de la scène.
« Est-ce que Stephen Harper est dans la salle? » a-t-il lancé d’un ton moqueur.
« Peut-être que M. Harper n’est pas ici ce soir. En fait, ce ne serait pas la première fois qu’il n’est pas au rendez-vous sur les changements climatiques », a-t-il enchaîné.
Heure de tombée oblige, La Presse a dû quitter les lieux durant une chanson de Daniel Boucher. La soirée devait se poursuivre avec des prestations d’artistes tels que Jorane, Dan Bigras et Garou.
Les profits de l’opération, si profits il y a, iront à la Fondation Sedna, pour financer des projets éducatifs. Ceux de Live Earth ailleurs dans le monde iront à l’Alliance for Climate Protection, organisme présidé par Al Gore.