Frénésie algéroise

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Les vendeurs proposent des articles spécialement pour ce jour férié pour femmes, hommes ou encore enfants, depuis le début du mois sacré car, selon eux, la plupart des ménages préfèrent faire leurs achats durant la première semaine de ce mois sacré afin d’éviter le rush lors de la dernière semaine où sont enregistrées de grandes bousculades dans les marchés et les magasins aussi bien dans les villages que les grandes villes. Les trottoirs sont envahis par une marée humaine qui se bouscule dans les marchés et s’arrête devant chaque étal pour constater les prix affichés des articles proposés spécialement pour cette fête religieuse. Les parents sont ainsi anéantis et assommés par les prix affichés et les enfants radieux et satisfaits de leur virée avec leurs parents pour l’achat de nouveaux habits. Quelques-un improvisent et d’autres empruntent juste pour satisfaire leurs enfants et passer une joyeuse fête.

La friperie, un refuge pour les petites bourses

Les ménages ayant un faible revenu et ne pouvant subvenir aux besoins de tous leurs enfants ne trouvent d’autre refuge que celui de s’orienter vers les magasins de friperie. Ils sont en effet nombreux à se diriger vers les friperies à la recherche de vêtements en bon état et à un prix raisonnable. Lors de notre virée au sein des magasins de friperie lesquels se répandent un peu partout au centre d’Alger, on a constaté qu’ils sont pris d’assaut, alors que par le passé quelques personnes uniquement les fréquentaient.  » Avec un salaire mensuel de 10 000 DA, comment pourrais-je acheter de nouveaux habits pour mes trois enfants « , dira une mère de trois enfants rencontrée sur les lieux avant d’ajouter « au lieu d’aller acheter des habits neufs qui absorberont tout mon salaire, je me dirige vers les friperies où je trouve pas mal de belles choses et à un prix abordable. Avant je n’avais jamais mis les pieds dans ce genre de magasins, de crainte d’attraper une maladie en les portant mais ma situation actuelle ne m’a pas laissé le choix ». Une autre femme qui traînait avec elle sa fille d’à peine dix ans, examine un jean avant de demander son prix au vendeur. Ce dernier lui répond qu’il fait 400 DA. Après que la fille l’ai essayé, la maman hésite puis se décide finalement à l’acheter. « Je sais parfaitement que ces habits sont déjà lavés mais c’est la seule solution pour que mes enfants soient satisfaits le jour de l’Aïd ; et entre nous qui saura que ces vêtement ne sont pas neufs après les avoir relavés et repassés », s’est-elle justifié.

Un père de quatre enfants, simple fonctionnaire, refusant de révéler le montant de son salaire, nous expliquera « j’ai dépensé tout mon salaire durant le mois sacré et la rentrée scolaire ; les manuels scolaires de ma fille en troisième année primaire m’ont coûté 2 000 DA, faites le calcul pour mes trois autres enfants, jamais je n’arriverais à leur acheter de nouveaux vêtements, » a-t-il déploré. Alors que ces derniers se mettent à la merci des magasins de friperie, d’autres font des sacrifices, évitant ainsi de s’orienter vers ces magasins intitulés  » les magasins de chiffon ». « J’ai seulement deux enfants et je ne vais pas mettre leur vie en danger en leur achetant des » chiffons « pour cela j’ai même emprunter de l’argent pour les vêtir, » nous dira l’enfant Mohamed rencontré dans un magasin de friperies à Chéraga.

Les parents assommés par les prix

Au marché de Aïn Benian, les rayons de vêtements et de chaussures enregistrent une affluence record ces jours-ci, à quelques jours à peine de l’Aïd El Fitr. Les parents accompagnés de leurs enfants font le tour pour vérifier les prix affichés avant de se décider à faire leurs achats. Les étals d’habits pour enfants sont les plus visités en cette heureuse occasion. Les tailleurs pour fillettes oscillent entre 2 500 DA et 3 400 DA, des ensembles pour garçons varient entre 2 800 et 3 500 DA. Les jeans sont proposés entre 1 500 DA et 2 000 DA, les bodies oscillent entre 600 et 800 DA.  » Chaque prix affiché l’est selon la qualité et la provenance des vêtements « , expliquera un vendeur d’habits pour enfants.  » Il y a une très grande activité ces jours-ci, c’est pour cela qu’on travaille du matin jusqu’à des heures tardives du soir, puisque plusieurs familles font leurs achats juste après le f’tour, » a-t-il ajouté. Devant un étal réservé aux vêtements de bambins, une filles agrippe à son père tandis que celui-ci tente, en faisant  » des acrobaties verbales « , tant bien que mal de convaincre le vendeur de négocier le prix d’un ensemble rouge pour fillettes, estimé à 2 500 DA, pour le ramener à 2 200 DA mais en vain. Le commerçant lui répondra par la notoire parade des commerçants :  » Il n’y a aucun gain, la marge bénéficiaire est déjà très très réduite.” Le père essaye de convaincre sa fille d’acheter autre chose mais cédera finalement au caprice de son enfant qui refuse catégoriquement de l’écouter. Un autre père de famille accompagné de son fils de 11ans, demande au vendeur le prix d’un simple ensemble. Le vendeur lui répondra qu’il est estimé à 1 800 DA.  » J’ai fait jusqu’à maintenant plusieurs boutiques et j’ai trouvé que tous les articles sont très chers pour moi, mais là j’avoue que ce prix me convient, je le prend, » nous avoue soulagé le père. Son enfant tente d’expliquer à son père que cet ensemble n’est plus à la mode. Nonobstant le mécontentement de son fils, son père l’acheta quand même en lui précisant  » je n’ai pas que toi à vêtir pour l’Aïd El Fitr ».

La qualité avant tout

Alors que certaines familles algériennes se basent sur les prix des articles (vêtements, chaussures…), d’autres misent sur la qualité. En effet, les produits de marque sont nettement plus chers mais cela n’empêche pas qu’il existe des articles proposés à des prix abordables. Comme c’est le cas des produits  » made in China « .

Même si ces produits sont moins chers, la majorité des familles algériennes ne se laisse pas attirer par ces prix, mais par la qualité du produit. « J’évite toujours d’acheter les produits chinois appelés “produits jetables” ; c’est vrai que ces produits sont moins chers, mais je me base sur la qualité en achetant les articles en provenance d’Italie ou de France, » nous expliquera Naïma, une enseignante, mère de trois enfants. Une autre nous dira  » c’est vrai que j’ai une petite bourse, mais je préfère acheter quelque chose de solide et non pas jetable qui tiendra seulement deux semaines. »

Lemya Ouchenir

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