Itinéraire d’un écrivain de génie

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Elève indiscipliné mais brillant, il part à Paris faire des études en droit, et s’y lie d’amitié avec Maxime du Camp en compagnie duquel, de 1849 à 1851, il fera le tour de la Méditerranée.

Une première crise d’épilepsie, en 1844, l’oblige à renoncer à ses études et à revenir en Normandie, au Croisset, près de Rouen, dans une demeure en bord de Seine. Enfermé dans son bureau, rideaux tirés sur les fenêtres, il ne va cesser d’écrire, reprenant, raturant, “gueulant” et réécrivant ses textes. Plutôt que de vivre, il préfère créer. Ce “bourgeois” qui vit retiré à la campagne, qui passe de l’exaltation au découragement, de l’ardeur au désespoir, a un caractère difficile.

Quand il ne “s’occupe pas de littérature” (selon son expression), il écrit —ne cessant de rompre et de se réconcilier avec eux— à ses amis ou à Louise Collet, sa maîtresse qui sera l’égérie de plusieurs poètes et romanciers. La “correspondance” de Flaubert, publiée après sa mort, est un témoignage unique sur le travail de l’écrivain. Il vit avec sa mère et une nièce orpheline pour laquelle, à la fin de sa vie, parce que son mari a fait faillite, il se ruinera.

Il commence “Madame Bovary” à l’automne 1851. Pendant cinq ans, il va rester enfermé à Croisset pour écrire ce roman inspiré d’un fait divers. Dès sa sortie en 1856 dans “La revue de Paris”, puis en volume en 1857, “Madame Bovary” fait scandale. Flaubert, qui est alors un inconnu, est poursuivi pour offense à la morale publique et religieuse et outrage aux bonnes mœurs. Il est acquitté mais repart brisé pour la Normandie. Il aurait préféré que le succès de son roman soit dû à son seule talent, et non pas à un scandale provoqué par des esprits étroits.

Rares sont d’ailleurs les contemporains (exceptés Baudelaire, Barbey d’Aurevilly et, à un degré moindre, Sainte-Beuve) qui reconnaissent l’originalité et la perfection d’écriture de cette œuvre.

Après “Salammbô” (1862), roman historique où il donne libre-courts à son goût des couleurs et du baroque, il entre dans une période “mondaine”, partageant son temps entre Croisset et Paris, où il se lie à Tourgueniev, George Sand, les frères Goucourt…

“L’Education sentimentale” (1869), roman réaliste, est mal accueilli : Flaubert s’en prend aux aristocrates comme aux révolutionnaires.

Même s’il fréquente des salons bonapartistes, il se veut d’une impartialité politique totale : “Je suis las de l’ignoble ouvrier, de l’inepte bourgeois, du stupide paysan et de l’odieuse ecclésiastique”. La guerre franco-prussienne de 1870 le révèle patriote : il s’enrôle infirmier puis lieutenant dans la garde nationale.

En 1872, tandis que sa santé se dégrade, il perd sa mère, puis en 1876, Louize Colet, et sa vieille amie George Sand. Il est confronté à des problèmes financiers ; les pièces de théâtre qu’il a écrites sont des échecs, mais il s’oppose encore à ce que son roman “Madame Bovary” soit adapté à la scène ; il doute de lui, de son talent, de sa vocation d’écrivain, vit en ermite, réfugié dans ses souvenirs. Il lui reste un ami, presqu’un fils, dont il a encouragé et soutenu les débuts littéraires : Guy de Maupassant.

Ce perfectionniste meurt sans avoir achevé son “Bouvart et Pécuchet”, qu’il voulait être le “roman de la médiocrité”, le 8 mai 1880, par suite d’une hémorragie cérébrale.

La postérité reconnaîtra son génie.

Nacer Maouche

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