Le lion victime d’un mauvais tour

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(2e partie et fin)

Sous l’effet de la chaleur et du soleil, le lion ressent des douleurs lancinantes aux pattes. Les lanières trop serrées creusent des sillons et font boursoufler les chairs. Le chacal qui avait prémédité le coup et qui s’attendait à de tels résultats s’était caché dans la forêt.Suprême injure, il envoie au lion meurtri des émissaires pour s’enquérir de son état.Ils arrivent de partout dans sa tanière, les uns par flatterie, d’autres pour savourer ces instant uniques où le lion pleure comme un enfant.Au fur et à mesure que les jours passent, le lion ne peut plus bouger. Il sent les ailes de la mort l’effleurer. Il n’a qu’un seul souhait, étriper le chacal qui s’est joué de lui. Il supplie ses congénères et ceux qui prétendent être ses amis, de lui trouver un remède pour ses pieds. Des charlatans proposent des remèdes, les uns plus farfelus que les autres. Mais le lion veut du concret, quelque chose qui le soulage sur le champ et non pas dans des mois.Certains qui se prétendent guérisseurs tentent de dénouer les lanières, mais dès qu’ils mettent la main dessus, le lion pousse des cris de douleur. Il refuse qu’on touche à ses pattes. Vaut mieux rester ainsi, qu’augmenter ses douleurs.Un jour, il reçoit la visite d’une perdrix. Le voyant dans un piteux état, prise de compassion pour ce lion, jadis la terreur de la forêt, elle lui promet de mettre fin à ses douleurs et sur le champ.Le lion n’en croit pas ses yeux.- Si tu me fais cela, je te serai éternellement reconnaissant !- Je vais essayer majesté, tu vas être étonné du résultat !La perdrix prend son envol et se rend dans une mare (tamd’ha). Elle plonge dans l’onde pure, s’imbibe le dessus des ailes, remplit son bec d’eau et revient à la tanière du lion. Elle verse des gouttelettes sur le cuir séché. Après quelques allers et retours, les lanières gorgées d’eau se distendent et s’assouplissent.La perdrix les dénouent avec son bec. Le lion est enfin libéré de ses carcans de cuir. Pour remercier la perdrix de son exploit, il lui dit :- Fkigh am chouia s-ilhiva inou athine isilek’en idharen inou !(Je vais te donner un peu de la peur que j’inspire, à toi qui as sauvé mes pattes de leur prison de cuir).C’est depuis ce jour que le vol fracassant des perdrix fait peur à celui qui est surpris.Après quelques jours de repos, remis sur ses pattes, le lion se met à la recherche du chacal qui lui a joué le mauvais tour.Le rencontrant face-à-face au détour d’un chemin, le chacal fait aussitôt volte-face. Le lion bondit dessus, mais ne réussit qu’a lui arracher un bout de sa queue.(Thatah’limthe is ou tharat’iouthe is)Malgré son échec du moment, le lion est très content. Avec ce bout de queue arrachée, il lui sera facile de trouver le chacal à la queue tronquée. Si le lion jubile, il n’en est pas de même du chacal dont la vie est désormais en danger.Pour resserrer l’étau sur lui, le lion convoque tous les chacals de la contrée à se présenter devant sa tanière. En apprenant la terrible nouvelle, le chacal est dans tous ses états. Il sait ce que cela signifie : Sa mort programmée. Mais le chacal ayant plus d’un tour dans son sac, réfléchit au moyen d ‘échapper au terrible fauve, qui veut lui faire payer au centuple, le mauvais tour qu’il lui a joué.Avant le jour fatidique, il rassemble ses congénères et leur dit :- Le lion est malade, son guérisseur attitré lui a prescrit des chacals à longues queues. Si vous ne voulez pas lui servir de repas, faites comme moi, coupez vos queues ! C’est la seule manière d’échapper à ses crocs,vous êtes avertis ! A bon entendeur, salut !Les chacals apeurés imitent le chacal à la queue tronquée.Le lendemain, en se présentant devant le lion avec les queues coupées, il lui fut impossible de distinguer le chacal qui lui a joué le sale tour.Ne pouvant accuser aucun chacal sans se tromper, il les relâche tous au bénéfice du doute. »Our kefount ethhoudjay inouOur kefoun irden tsemzine. As n-elaïd anetch aksoum tsh’emzine ama ng’a thiouanzizine. »(Mes contes ne se terminent comme ne se terminent le blé et l’orge. Le jour de l’aïd, nous mangerons de la viande et des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).

Benrejdal Lounes

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