L’identité des soldats toujours inconnue

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Le cimetière historique du village Tikaâtine attend toujours d’être protégé de l’usure des années et de la dégradation. Contenant les tombes de plus de six-cents (600) soldats qui ont combattu à l’arrivée de l’armée française, ce cimetière est proche de la disparition à cause de l’état d’abandon dans lequel il est resté. Pourtant, depuis quelques années, beaucoup de connaisseurs tirent la sonnette d’alarme pour alerter les élus locaux sur l’urgence de faire un petit effort pour sauvegarder ce pan de notre mémoire collective. En effet, ce lieu chargé d’histoire situé à quelques dizaines de mètres en haut du village Tikaatine, à cinq kilomètres du chef-lieu de la commune de Boudjima, attend toujours une petite clôture qui protègera le reste des tombes. Un simple barbelé peut faire l’affaire. Mais en fait, l’état d’abandon n’est pas dû uniquement au manque de volonté des élus, l’ignorance en est également une cause importante. L’histoire de ces soldats, tous originaires des villages voisins, est encore méconnue. Disons plutôt que le caractère oral de la tradition locale a ses tares et ses limites. Après près de deux siècles, personne ne se souvient parfaitement de ces tombes qui ne veulent et ne doivent pourtant pas mourir. Même les personnes âgées du village Tikaatine n’ont pas connaissance des personnes enterrées sur les lieux, comme dans la plupart des villages de Kabylie où les tombes anonymes, faute de pierres tombales apparues très récemment, ne sont identifiées que de mémoire, quand la descendance se transmet l’information d’une génération à l’autre. L’histoire locale stipule que ce cimetière est celui où sont enterrés les jeunes des villages de la région partis en soldats combattre l’armée française à son débarquement sur le littoral. Menés par le grand chef de guerre Ali Oumhand de Tala Bouzrou, commandant de l’armée des Zaamoum, ils ont combattu à Staoueli. N’ayant pu arrêter l’armée française qui poursuivit sont avancée, une autre bataille les opposa à Taouarga où le commandant Ali Oumhand tomba au champ d’honneur avec des centaines de ses soldats dont les 600 jeunes de la région de Boudjima. Leurs corps ont été ramenés de nuit de Taouarga et enterrés respectivement sur les hauteurs de leurs villages. Aujourd’hui donc, ces tombes sont les seuls témoins de cette grandiose histoire de patriotisme et de sacrifice pour la mère patrie. La protection de leurs tombes est le moindre des devoirs que nous devons à ces braves enfants de l’Algérie. Une clôture, en attendant que des chercheurs et des historiens se penchent sur cet épisode pour essayer de sortir ces tombes de l’anonymat.

A. N.

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