Dans cet entretien, le P/APW de Tizi-Ouzou, Youcef Aouchiche, revient dans les détails sur le projet de la zone industrielle de Souamaa, inabouti depuis 2011
La Dépêche de Kabylie : Demain (ndlr, aujourd’hui) votre Assemblée consacrera une session extraordinaire à la zone industrielle de Souamaa. Pouvez-vous nous donner plus de détails ?
Youcef Aouchiche : Notre Assemblée organise cette session extraordinaire pour discuter de ce projet parce que l’assiette foncière sur laquelle il sera érigé a fait couler beaucoup d’encre. Rien n’est encore fait pour matérialiser cette zone, créée par décret en 2011 et validée en tant que projet depuis 2012.
Notre Assemblée a déjà fait beaucoup dans la récupération du foncier industriel, notamment la demande d’inscrire à la wilaya de nouvelles zones d’activités et industrielles qui peuvent accueillir des projets d’investissement. Le parc industriel de Souamaa est d’une importance capitale. Initialement, il totalisait 372 ha. Une quarantaine d’hectares ayant été classés terre à haute potentialité agricole, la surface actuelle de la zone est réduite à 327 ha.
La population locale et les opérateurs économiques l’attendent avec beaucoup d’intérêt. Il faut savoir que le foncier industriel fait défaut à Tizi-Ouzou et ce projet-là constitue une véritable bouffée d’oxygène pour l’investissement et, donc, le développement de notre wilaya. Mais hélas, sur le terrain, rien n’a été fait pour la concrétiser. Selon les statistiques disponibles à notre niveau, ce parc de 327 hectares peut créer jusqu’à 150 000 emplois.
C’est pour cela que notre Assemblée organise cette session spéciale zone de Souamaa, en vue de discuter et de débattre afin de lever tous les obstacles qui empêchent sa réalisation. Mes prédécesseurs ont déjà travaillé sur ce dossier. Ils ont installé une commission d’avocats, pour trouver et proposer des solutions et des recommandations aux deux parties en conflit, car les opposants demandent à être indemnisés et l’administration dit que ces terres sont domaniales et qu’il ne peut, par conséquent, y avoir d’indemnisations.
À votre avis, où réside la solution pour la concrétisation de ce projet ?
Notre vision est simple : il faudrait qu’il y ait des concessions de part et d’autre et encourager la culture du compromis et de la médiation. Nous n’avons pas besoin d’un show médiatique pour régler le problème de la zone de Souamaa. Il faut être réalistes. Nous, en tant qu’institution, nous traitons ce dossier avec responsabilité et réalisme pour le solutionner.
Il ne s’agit pas de revendiquer la paternité d’un projet ou de prétendre détenir la solution seuls. Si quelqu’un détient vraiment clé du problème, nous sommes preneurs car l’important est de débloquer ce projet et de permettre aux industriels de s’installer et de développer la wilaya de Tizi-Ouzou, ce qui est l’objectif numéro 1 de l’APW et de l’ensemble de la population.
La surenchère politique ne sert pas le traitement du dossier de la zone de Souamaa. Nous voulons un consensus entre l’administration et les occupants. L’administration pratique la politique de la fuite en avant, c’est à se demander si cette situation ne l’arrange pas ! Nous devons proposer des solutions pour sortir ce projet de l’impasse qui n’a que trop duré. 7 ans de blocage, c’en est trop !
Cette session donnera la chance à tous les intervenants de faire part de leurs idées à même de traverser cette situation de blocage. Nous demanderons, lors de cette session, la réalisation immédiate de ce projet parce qu’il est vital pour la relance économique de notre wilaya. Ce blocage n’arrange pas le développement de notre wilaya auquel nous donnons une importance capitale.
Si on arrive à concrétiser ce parc industriel, 150 000 emplois seront créés et nos jeunes ne galéreront plus à travers les wilayas, pour trouver du travail et n’oseront plus penser à la Harga, au péril de leur vie. Une feuille de route commune doit être tracée sans tenir compte des sensibilités. Les calculs politiques étriqués doivent être mis de côté. Les difficultés sont connues, il faut s’y mettre sérieusement.
Nous avons dès le début discuté avec les occupants, les élus locaux, le comité de village de Souamaa et les directions concernées. Nous avons essayé de rapprocher les points de vue. Mais il y a un manque de volonté politique, si ce n’est carrément une absence. On ne doit pas mettre tout sur le dos des opposants, non, ce n’est pas normal. Que font les services de l’État ? Quel est leur rôle ? Ils doivent assumer l’entière responsabilité dans le règlement de ce dossier.
Les élus de l’APW vont essayer demain (ndlr, entretien réalisé hier) de relancer le dialogue entre les différentes parties pour une issue juste à ce blocage. Y a-t-il des mesures précises pour aboutir à un dénouement heureux ?
L’occasion sera donnée aux deux parties de s’exprimer, notamment les services domaniaux, qui ne font pas suffisamment leur travail pour contribuer à solutionner ce litige. Lors de la session, nous allons les interpeller pour qu’ils assument leurs responsabilités. Ce qui nous importe, ce sont les solutions. Nous avons déjà proposé aux occupants de faire des concessions.
Bien sûr, les gens qui ont bâti, qui exploitent ces terres depuis de nombreuses années, doivent être accompagnés. Il y a de l’argent destiné à l’indemnisation, ce montant avoisine 245 milliards de centimes. Les services des domaines ont été également priés de faire des concessions, car ce montant doit être exploité pour indemniser. On ne peut pas ne pas indemniser les exploitants et ceux qui ont bâti. Il faut faire des concessions pour une solution consensuelle, c’est l’objectif recherché par notre Assemblée.
La médiation et le compromis doivent prévaloir sur toute autre considération, car il s’agit de l’intérêt de toute la région. C’est l’investissement qui garantira le développement de notre wilaya, c’est notre priorité. Nous allons aussi organiser des assises sur l’investissement prochainement.
Le dossier de Souamaa est une urgence, que sera-t-il demandé au juste lors de cette session ?
Le dossier de Souamaa est une urgence, en effet, et pour plusieurs raisons. D’abord, c’est un projet qui a trop tardé. Puis, il offre des opportunités de travail. Les subventions destinées à sa viabilisation, à l’aménagement et aux indemnisations, nous craignons qu’elles ne retournent à la trésorerie.
Ce serait inacceptable. Il faut que tout le monde assume sa part de responsabilité. Notre Assemblée et nos prédécesseurs ont assumé la leur, ils ont créé une commission d’avocats pour travailler sur ce dossier. Ils ont proposé des solutions concrètes, qui ne sont, malheureusement, pas prises en considération par les deux parties en conflit. Notre vision est claire : il faut que les deux parties fassent des concessions et qu’elles comprennent que ce projet doit être réalisé, sans entêtement.
Il ne faut pas laisser filer une telle opportunité pour notre wilaya. Nous allons interpeller encore une fois les pouvoir publics à assumer leurs responsabilités dans ce dossier. Nous prions aussi les occupants à comprendre que l’APW n’est et ne sera pas contre leur indemnisation. Le plus important reste le développement de la wilaya. Leurs intérêts seront préservés et défendus par nos élus. Nous allons, aussi, saisir le ministère des Finances pour instruire ses services à prendre en charge ce dossier que nous allons suivre jusqu’à son aboutissement.
Nous demanderons la réalisation immédiate de cette zone et que chaque partie assume sa responsabilité ! Nous sommes prêts à encourager le dialogue et la concertation pour trouver une solution juste et équitable. Actuellement, plus de 1 000 dossiers d’investissement sont enregistrés, il n’y a que 370 projets qui sont retenus et certains d’entre eux font face à différentes contraintes. Avec la réception de la pénétrante et la réalisation de la zone de Souamaa, notre wilaya gagnera en attractivité.
Entretien réalisé par H. T.

