Kateb Yacine revisité

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Au troisième jour du Festival International du Théâtre de Béjaïa, deux pièces de Kateb Yacine ont été programmées Particularité de cet événement, les deux pièces abordent la même œuvre du célèbre écrivain, poète et dramaturge algérien.

Une conférence de presse a, ainsi, été organisée avec deux metteurs en scènes : d’un côté Djamel Abdelli qui a travaillé sur le texte même de l’œuvre de Kateb, traduit vers l’arabe dialectal par Omar Fatmouche, Commissaire du Festival et directeur du Théâtre Régional de Béjaïa ; De l’autre, Farid Oukala, qui est venu de Toulouse pour présenter sa pièce basée sur la même œuvre. Une troisième a également été prévue, mais son metteur en scène ne s’est pas présenté à la conférence de presse. Ce qui était curieux, c’est que ladite conférence n’était pas prévue à ce moment du festival. Il devait y avoir une journée de visite du site de Ifri Ouzellaguen, là où le Congrès de la Soummam s’est déroulé en 1956. Les journalistes devaient s’y rendre pour découvrir l’endroit, d’autant plus que cela devait se passer la veille de la célébration du soixantième anniversaire du déclenchement de la révolution. Mais l’événement a été annulé au profit d’une conférence de presse improvisée. On attendait à ce que les metteurs en scène présentent leur travail, qu’ils parlent de l’expérience du montage de la pièce, des acteurs, des objectifs du travail, du traitement croisé de l’œuvre aux travers de la présentation de trois visions différentes de la pièce de Kateb Yacine, mais ce ne fut pas le cas. La parole était immédiatement donnée aux journalistes qui ne savaient quoi dire, puisque ladite conférence de Presse s’est déroulée avant même la présentation des pièces au public. Après un moment de silence gêné quelques journalistes se sont aventurés à poser quelques questions. C’est Farid Oukala qui a le plus parlé essayant de sublimer la personne et l’œuvre de Kateb Yacine, insistant sur la qualité du texte et sur la pérennité de l’œuvre et son actualité. Le cadavre Encerclé lui rappelait le corps criblé de balles du Colonel Amirouche, enchaîné et surveillé par les soldats français qui avaient peur qu’il ne se ressuscite. L’œuvre lui rappelle également les injustices subies à Alep, Damas et Baghdad, donnant ainsi une dimension actuelle à l’œuvre du poète de la Révolution Algérienne. C’est un moyen de dénoncer l’injustice et l’impérialisme. A une question relative au lien à faire entre un cadavre, symbole de la mort, et la vie à laquelle aspire la jeunesse algérienne, le scénariste a essayé d’expliquer qu’il fallait éveiller les gens, pour se débarrasser du poids lourd de notre passé pour la découverte de nouveaux horizons. Ignorait-il la réalité de notre jeunesse qui ne regarde plus le passé de son pays, soupçonné d’avoir été travesti et trafiqué ? Les jeunes ne regardent pas au passé ils sont l’avenir du pays. Farid Oukalla, vivant en France, a-t-il de la peine à percevoir l’évolution de la société algérienne ? Comment créer un lien entre notre histoire et la rende vivante, pour faire en sorte que notre jeunesse se l’approprie ? Djamel Abdelli a été plus réaliste. Il présente une pièce toute simple, selon lui, sans essayer de diviniser Kateb Yacine ou de le porter aux nues. C’était un algérien comme les autres, avec sa vision et sa sensibilité qui a exprimé ces sentiments et ses pensées. C’est au public de tirer le meilleur de son œuvre, et la pièce de théâtre n’est qu’un angle de vue de cette dernière. Le fait de regarder les différentes pièces jouées à partir du même texte permettrait d’en apercevoir les différences de points de vue entre les metteurs en scène. Si le cadavre est encore encerclé c’est qu’il demande encore à être libéré. Libérer pour dire quoi et quoi faire ? Les deux metteurs en scène invitent à regarder le jeu des acteurs et l’expression de leur art, pour essayer d’en tirer les conclusions. Signalons enfin qu’une journée d’étude sur l’œuvre de Kateb Yacine est prévue pour hier, jour de la commémoration du soixantième anniversaire de la Révolution Algérienne.

N. Si Yani

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