La cour criminelle de Béjaïa devrait examiner, lors de sa présente session, une affaire particulièrement retentissante dont l’issue pourrait ouvrir la voie au réexamen d’un procès et à la réparation d’une terrible erreur judiciaire. Un homme croupit, depuis dix ans, en prison pour un crime qu’il n’a peut-être jamais commis.
Toute l’affaire s’est réemballée depuis le mois d’août dernier lorsqu’une personne, vraisemblablement en proie à un profond remord, se présente à la police d’Akbou pour avouer un meurtre commis, en 1996, sur la personne de Mme Mennoune A.B., une veille femme résidant alors à la cité des 504 logements. Face à des inspecteurs ahuris, S.H. endosse toute la responsabilité du crime et implique un complice M.B.B., qui lui aurait d’abord résisté avant de cracher le morceau.
Un crime officiellement » élucidé » et pour lequel Amar Ait Bessaï a été condamné à vingt ans de réclusion criminelle.
Quoiqu’inscrite officiellement au programme de la présente session criminelle qui se poursuit depuis le 18 novembre courant, l’affaire n’est pas encore portée sur le rôle placardé sur les murs de la cour. Tout en donnant confirmation de cette programmation, M. Mohand-Tayeb Lazizi, procureur général près la cour de Béjaïa, nous a précisé, récemment, que le code des procédures pénales subordonne la révision du précédent procès à l’issue du prochain. Autrement dit, et malgré les aveux faits à la police, leur auteur est toujours présumé innocent jusqu’à ce que la cour statue sur les nouveaux développements. Ce qui implique la non-libération d’Amar Ait Bessaï qui, lui, est toujours tenu pour coupable par autorité de la chose jugée.
Mais loin des méandres escarpés des procédures, tout le monde semble convaincu de l’innocence de celui qui a été « machinalement » jeté en prison, voilà dix ans.
Pour les observateurs locaux de la chose judiciaire, nous serons bel et bien en présence d’un « Outreau » à l’algérienne : une détonante affaire qui met à nu des insuffisances de l’enquête policière, de l’instruction judiciaire et de la procédure de jugement.
Signe des temps et comme précocement secoués par les conclusions de cette affaire, les juges que d’aucuns accusent d’abonder mécaniquement dans le sens des conclusions de l’instruction, multiplient les attitudes de défiance.
Rien que pour la présente session criminelle, deux accusés, au moins, ont été purement et simplement acquittés malgré la sévérité des réquisitoires du parquet.
Accusé d’attentat à la pudeur avec violence et détournement de mineur, M.L. a été ainsi innocenté par le juge, dimanche dernier, alors que le parquet avait requis 20 ans d’emprisonnement (Voir la dépêche de Kabylie datée du 21 novembre 2006).
Le lendemain, c’était au tour de K.A. de bénéficier de la même clémence alors qu’il comparaissait pour homicide volontaire avec préméditation (Voir la dépêche de Kabylie du 22 courant). Les juges avaient dans tous les cas stigmatisé l’insuffisance des preuves et, partant, exigé de l’instruction un travail plus fouillé. Ce qui, selon les observateurs, n’est pas généralement de règle.
M. Bessa