» Si ça continue, un octobre 1988 bis est à prévoir  »

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Pour Rédha, l’équation de l’offre et de la demande n’y est pour rien dans cette nouvelle flambée des prix. Il revient, suggère-t-il, à l’Etat d’intervenir,  » soit afin de booster le marché, soit d’augmenter les salaires « . Il n’a pas omis d’avertir sur les conséquences de ces augmentations courantes et de la pauvreté qui prend de l’ampleur. Plus explicite, il se demande pourquoi les autorités ne procèdent-elles pas à l’importation de ces produits de base pour faire baisser les prix,  » surtout que le mois sacré approche « , soutient-il. Il conclue par cette crainte de voir les choses se compliquer davantage et se dégénèrer :  » Si les prix augmentent encore, particulièrement la semoule et le lait, un 5 octobre 88 ne serait pas loin ! « , a-t-il averti. Boubekeur, un quinquagénaire, père de famille, a résumé tout ce que le peuple pense d’en bas :  » Plus de 100 milliards US des réserves de change et les prix augmente, la vie devient de plus en plus difficile. Tout ça, c’est comme vivre dans une famille très aisée financièrement et avoir un mauvais père ! Nous vivons dans la misère parce que nos gestionnaires sont mauvais… « . Avec un salaire de 13000 DA, il affirme qu’il fait des calcules parfois  » trop bêtes « , comme par exemple,  » acheter quelques cigarettes ou un paquet complet… « . Pour lui, l’augmentation des salaires est inéluctable. Durant notre marche, nous croisons Abdelghani, âgé de 29 ans et  » chômeur de profession « , il se pose une question,  » une logique « , dit-il.  » L’argent est à perfusion, normalement, l’Etat a de quoi contrôler le marché, non ! « , et de poursuivre,  » les jeunes sont livrés à eux-mêmes, il leur faut des infrastructures « . Quant à l’augmentation des prix de produits nécessaires, il se demande pourquoi les autorités n’ont pas opté pour l’importation de ces produits et de la graine pour, pense-t-il  » pousser nos producteurs à baisser les prix « . Ce jeune s’est par ailleurs montré inquiet quant à son avenir et celui de la jeunesse algérienne en générale.  » J’ai déposé un tas de dossiers pour obtenir un poste de travail, malheureusement, il n’y a que le piston et les passe-droits qui marchent dans ce bled ! « .

« L’Algérie ne sera qu’un mauvais souvenir… »

Une symptomatique expression lancée par un jeune du quartier Belcourt pour résumer ce marasme qui ébranle toute la jeunesse algérienne. Yacine qui, à peine la vingtaine entamée, a déjà d’autres projets en tête.  » Si t’as une quelconque volonté d’aller de l’avant et trouver un travail, le mieux qu’on puisse te proposer, est un salaire médiocre qui ne dépasserait jamais les 9000 DA « , déplore-t-il. Son ami, Okba l’apostropha :  » Ils n’accordent du travail qu’aux filles et aux riches, pour nous, dit-il, on a pas encore vu l’argent du pétrole « . Aussi très jeune, Yacine a néanmoins constaté, qu’au-delà des flambées des prix et de la cherté de la vie,  » l’Algérie a perdu ses valeurs et ses repères « , et d’ajouter que  » les gouvernants ne changent jamais… « . C’est à cette raison, renchérie-t-il que  » la seule solution, est la harraga « , dès lors, soutient-il,  » l’Algérie ne sera qu’un mauvais souvenir « .

Et à Redouane de faire une ligature entre ces augmentations et l’ignorance. Pour lui,  » plus la vie est chère, plus la pauvreté s’accroît, et plus la pauvreté gagne le peuple, plus l’ignorance investit les couches sociales « .

Grosso modo, tous les citoyens interpellent les pouvoirs publics quant à ces poussées des prix et, naturellement, à améliorer un pouvoir d’achat de plus en plus bas.

Yassine Mohellebi

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