Perchée sur l’une des collines du douar historique Azrou N’bechar, dans la circonscription d’Oued Amizour, ce petit patelin de 300 âmes aujourd’hui, a donné les meilleurs de ses fils à la guerre de libération pour une pleine participation à la révolution, malgré les difficultés du terrain et la situation sociale désastreuse de ses habitants qui n’ont ménagé aucun effort pour porter main-forte aux hommes de l’ALN qui écumaient ces reliefs.
Se faisant donc un passage rassurant et un dépotoir d’armes aux moudjahidine, il se trouva rapidement dans le collimateur du capitaine à la tête des troupes françaises cantonnées à Amizour qui a ordonné la destruction totale du village et cela à l’insu totale des paisibles villageois de Drari.
Adjudant au sein de l’ALN, Yahiaoui Mohand Amokrane tombé au champ d’honneur et fils de ce petit village martyr, eut l’ingéniosité et le miracle de voler cette information pour avertir à temps les habitants de son village natal du désastre qui les guettait en les sommant de quitter les lieux. Le village « maudit » fut évacué en catastrophe.
Ce qui résista aux obus fut incendie par les soldats ennemis.
Le 11 mai 1956, le village Drari se transforma en amas de pierres et de terre brulée, sans pour autant dévoiler ses caches d’armes à l’ennemi. Plus d’un demi-siècle passé depuis cette escalade punitive et destructrice, les habitants de Drari viennent de rendre hommage à leurs aïeux et aux huit chahid issus de ce village victime de l’oubli et des lacunes historiques.
Dans une modeste célébration organisée à la petite placette du village, des moudjahidine de la région, des fils de chouhada et des autorités locales se sont mêlés aux jeunes du village, animateurs au sein de l’association locale initiatrice de cette manifestation.
Ambiance particulière au cœur de ce village transformé pour la circonstance en un théâtre de verdure où des chants patriotiques fusent. Un grand emblème national accroché à l’entrée du carrée du regroupement et une exposition de livre et écrits retraçant la révolution étaient au sommaire de cette commémoration, une aubaine de retrouvaille pour les anciens maquisards.
Un énorme obus récupérer dans les fondations d’une maison ruinée lors de l’attaque du 11 mai 1956 et appartenant au chahid Mammeri Mohand Akli attire l’attention. Le petit-fils de ce martyr explique qu’il s’agit d’un projectile d’aviation qui date de 1945 qu’on lançait pour causer des destructions importantes.
Notre interlocuteur ajoute qu’une quantité d’armes à feu légères des maquisards a été trouvée dans les mêmes entrailles. Ce qui explique l’objectif de bombardement qui visait les caches d’armes et de munitions de la révolution.
Les bombardements n’ont pas laissé grand-chose aux habitants de Drari pour mieux meubler leur exposition. Rares sont les photos de leurs huit martyrs dont l’endroit d’enterrement de certains n’est toujours pas connu, comme affirme un fils de chahid qui souhaite néanmoins eriger une stèle pour son père à l’endroit de sa mort. Le bureau des moudjahidine de Bejaia exhorte les responsables locaux d’Amizour à se réapproprier cette date historique par réhabiliter les martyrs d’Azrou N’Bechar en baptisant à leurs noms des édifices publics. Aussi, l’aménagement et l’embellissement du village historique s’imposent en considération des sacrifices de ses habitants qui méritent un cadre de vie meilleur afin d’éviter l’exode d’un village symbole de résistance et de liberté. Drari est un village au passé glorieux qui attend un avenir prospère.
Nadir Touati