Bien que désolant et hideux, le chantier de démolition de la ville d’Aïn El Hammam attire chaque jour, un public nombreux venu observer le prototype de l’état de déliquescence dans lequel consciemment ou inconsciemment, on a plongé leur cité. Des milliards, dépensés en réalisation et d’autres en démolition, sont en train de partir en fumée. Tant d’argent et de temps et de larmes pour arriver à créer à Michelet, un “ground zéro”. Les spectateurs, sous un nuage de poussière, soulevé par les nombreux engins de destruction, ne quittent les lieux qu’après avoir assisté à l’effondrement de quelques poutres et murs. Ils ne cessent de spéculer sur l’avenir de leur ville. Mis à l’écart de toute information, concernant la suite qui sera donnée aux travaux en cours, ils ne cessent de spéculer. Certains voient déjà l’érection de nouvelles bâtisses sur de nouvelles bases alors que d’autres plus rêveurs pensent plutôt à des parcs avec espaces verts, de vastes parkings et un marché moderne et spacieux. Ce qui relève de l’utopie pour une région dont le projet le plus important de ces dernières années, est celui des démolitions qui engloutissent plus d’argent que les constructions. Depuis que les bâtiments, étage par étage, laissent la place au vide, les citoyens qui ont perdu leurs repères sont désorientés. Les devantures de leurs magasins préférés croulent sous les gravats. Comme de nouveaux débarqués “chez eux”, ils se retrouvent à se chercher une autre épicerie, un autre café ou tout simplement un endroit ombragé où rencontrer des amis. Plus loin, du côté de la place, d’autres assistent à ce spectacle déprimant qui devrait encore durer, au grand dam des riverains, contraints de s’y adapter. La tristesse des ruines, le bruit lugubre et assourdissant des marteaux piqueurs achèvent le dernier espoir de ceux qui pensaient qu’un jour, il ferait bon vivre à Michelet.
A. O. T.