“Je peins, donc j’existe”

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Entre une cuillère, un stylo et un pinceau, il a choisi un pinceau sans plus attendre, presque d’instinct; un choix qu’il assume avec brio et ce depuis sa plus tendre enfance. C’est que Toufik Hadibi, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a la peinture dans les veines, la passion au cœur et le pinceau en bandoulière. L’enfant de Djenane, ou il a vu le jour en juillet 1982, s’était fait remarqué dès l’école primaire pour ses penchants exubérants pour le dessin allant crescendo jour après jour. A dix-huit ans, il réalise sa première aquarelle ; une nature morte reflet de ses vérités intérieures, un mélange de soucis et de rêves inavoués, rehaussés par des couleurs et des recoins d’obscurité. Depuis, avec des touches d’une extrême dextérité et un regard empreint de gaieté, il a concocté dans son garage atelier une quarantaine de tableaux débordant d’une ineffable sensualité que dispute le souffle tragique du quotidien. Pour notre autodidacte au pinceau racé, la peinture dans notre pays végète aux rives de l’agonie. Les arrières-pensées commerciales et le gain rapide ont tué toute initiative de formation, de patience, de libre création et il déplore le manque sinon, l’inexistence d’organisme dévoué exclusivement à la prise en charge et la promotion des artistes plasticiens, talon d’Achille de la discipline. Admirateur sans bornes des maîtres du surréalisme tel André Breton, Salvador Dali et autre René Magritte, Toufik avoue également se passionner pour l’univers d’Issiakhem, une des icônes de la peinture dans notre pays mort en 1985. En 2006, Toufik a reçu le deuxième prix national à Skikda lors du festival national des arts plastiques, ce qui est en soi, à un gage de reconnaissance pour un passionné oeuvrant à des lieues des ululements voraces des cupides marchands d’arts et d’un monde gagné par la haine sourde et charcuté par de vilaines guerres. Dans la foulée, il a notamment illustré la couverture de Bururu, ur tengir ur teqim, le roman épique de Tahar Ould-Amar et accessoirement une poignée de couvertures de CD. L’âge aidant, boosté par une maturité à défier les pires obstacles, comme un oiseau fait son nid, Toufik Hadibi a tracé son propre chemin qu’il défriche au quotidien avec persévérance, arrosé par une multitude de décharges émotionnelles et un franc réalisme qu’il considère comme la pierre angulaire du surréalisme même. Généreux dans l’esthétique, il l’est aussi dans la vie quotidienne. L’âme d’artiste ne saurait mentir, actuellement il pilote contre vents et marées un atelier de peinture pour enfants et jeunes inscrits au sein de la Maison de jeunes de Chemini.

Tarik Djerroud

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